Motion d’adjournment – les ressources naturelles

Elizabeth May : Monsieur le Président, j’étais plutôt surprise de constater que la question que j’ai posée au premier ministre le 5 décembre, peu avant le congé de Noël, a été associée aux ressources naturelles par la personne responsable de la rubrique des questions posées dans le cadre du débat d’ajournement; j’estime plutôt qu’elle concerne les droits des Premières Nations et les responsabilités du ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien. Le fait est que la question que j’ai soulevée est, au sens large, très importante, et touche en particulier à un dossier plutôt troublant.

Le 5 décembre, j’ai posé ma question au premier ministre. Par coïncidence, il a créé ce jour-là son propre groupe de travail et a demandé à M. Doug Eyford de rédiger un rapport sur l’établissement de partenariats et de relations avec les Premières Nations sur la question des projets énergétiques de la côte Ouest.

Le rapport a confirmé ce que tout le monde savait déjà. La Cour suprême du Canada a précisé très clairement que le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les sociétés qui ont affaire aux droits et aux territoires des Premières Nations ont l’obligation, aux termes de la Constitution, d’effectuer des consultations sérieuses et approfondies avec les Premières Nations avant de lancer des projets de développement des ressources sur leurs terres.

Le rapport de M. Eyford contient quatre points. Il encourage le premier ministre à renforcer des liens de confiance, à encourager l’inclusion, à faciliter la réconciliation, et ensuite à prendre des mesures.

J’ai parlé au premier ministre des terribles événements qui se sont produits dans la Première Nation d’Elsipogtog, une communauté mi’kmaq installée près de Rexton, au Nouveau-Brunswick. La communauté devait traiter une proposition concernant un enjeu énergétique, plus précisément la fracturation hydraulique, une technique non traditionnelle. La communauté d’Elsipogtog bénéficiait d’un appui massif de la population du Nouveau-Brunswick et des communautés voisines, qui s’opposaient aussi à la fracturation, parce qu’elles s’inquiétaient de ses effets sur les eaux souterraines.

Les manifestations qui ont mené à des arrestations ciblaient SWN, une entreprise de Houston qui souhaitait procéder à des essais sismiques et à des essais de fracturation hydraulique. Ces essais avaient l’appui du premier ministre du Nouveau-Brunswick, mais pas celui de la population ni des Mi’kmaq. Les essais exploratoires devaient avoir lieu sans aucune consultation avec les Premières Nations Elsipogtog et Mi’kmaq, ce qui va à l’encontre de nombreuses décisions judiciaires. On pense particulièrement à l’affaire Marshall, qui portait spécifiquement sur les droits des Premières Nations Mi’kmaq. Cette Première Nation a des terres non cédées. Impossible d’imaginer un traité, quel qu’il soit, qui rendrait acceptables les événements qui se déroulent au Nouveau-Brunswick et les pressions exercées en faveur de la fracturation hydraulique sur le territoire d’une Première Nation.

Voici la question que j’ai posée au premier ministre:

Vu que les manifestations contre la fracturation sont sources de tensions croissantes au Nouveau-Brunswick, le premier ministre reconnaît-il que la Constitution l’oblige à consulter de façon exhaustive les Mi’kmaq d’Elsipogtog avant que toute fracturation soit effectuée sur leurs terres non cédées?

Le premier ministre a répondu qu’il comprenait ses obligations et qu’il venait d’ailleurs tout juste de recevoir le rapport de M. Eyford dont je viens de parler.

En tant que représentante de la Colombie-Britannique et députée de Saanich—Gulf Islands, je suis encore profondément préoccupée par cet incident. Bien des gens s’inquiètent grandement de ce qui pourrait se passer si — Dieu nous en préserve — le trajet d’un pipeline qui passerait sur des terres de Premières Nations était approuvé sans l’approbation des Premières Nations et des Britanno-Colombiens.

Si les événements d’Elsipogtog devaient se reproduire en Colombie-Britannique, je serais vivement préoccupée. Il n’y avait pas eu de consultation, on n’avait pas essayé d’établir un climat de confiance ou de bonnes relations et il n’y a eu aucune tentative de réconciliation. On a plutôt eu droit à des arrestations musclées de la GRC, alors que, jusqu’à ce moment-là, la manifestation s’était déroulée sans violence. Une explication s’impose.

Colin Carrie : Monsieur le Président, je pense que ma collègue sait déjà que la fracturation relève généralement de la compétence provinciale. Cependant, il me fait plaisir d’affirmer que le gouvernement s’efforce toujours de répondre à ses obligations constitutionnelles.

Les consultations avec les Autochtones font partie intégrante de nos initiatives d’exploitation responsable des ressources. Je suis heureux d’avoir l’occasion d’expliquer en quoi le gouvernement oeuvre à renforcer la participation des Autochtones dans les secteurs des ressources.

L’industrie emploie déjà quelque 32 000 personnes autochtones, plus que tout autre secteur de l’économie. Ce niveau d’emploi ne fera qu’augmenter à mesure que de nouveaux projets sont présentés. Des projets d’une valeur totale de plus de 650 milliards de dollars ont été proposés, dont la majorité sont sur des terres autochtones ou avoisinent des terres autochtones. Ces projets pourraient stimuler la prospérité des collectivités autochtones.

La députée d’en face a clairement manifesté son opposition à l’exploitation des ressources. J’espère qu’elle nous excusera de vouloir emprunter une voie différente.

Le gouvernement veut s’assurer que nous exploitions nos ressources de façon responsable afin de créer des emplois tout en protégeant l’environnement. Le plan du gouvernement en la matière consiste à améliorer le système réglementaire du Canada en réduisant les tracasseries administratives et en modernisant les processus, tout en renforçant la protection environnementale et en intensifiant les consultations avec les peuples autochtones.

Comme l’a mentionné ma collègue, nous prenons des mesures. Douglas Eyford, le représentant fédéral spécial du Canada concernant l’infrastructure énergétique de la côte Ouest, a récemment formulé des recommandations à l’intention du gouvernement qui favoriseront une participation accrue des Autochtones à l’exploitation des ressources. Les thèmes du rapport Eyford — la confiance, l’inclusion et la réconciliation — pourront guider les parties dans la consolidation de relations qui sous-tendront l’exploitation responsable des ressources naturelles et la participation des peuples autochtones. Ce rapport du représentant fédéral spécial jette des bases solides pour un dialogue suivi avec les peuples autochtones de la côte Ouest. Il constate que les communautés autochtones pourraient tirer des avantages durables des activités de développement responsable des ressources et y participer en tant que partenaires.

Le gouvernement continue de consulter les collectivités autochtones pour trouver des moyens concrets de mettre en oeuvre les recommandations du rapport.

Le rapport Eyford fait fonds sur les initiatives antérieures du gouvernement en vue de favoriser la participation des Autochtones dans le secteur des ressources naturelles. Par exemple, en 2012. le budget fédéral a consacré plus de 690 millions de dollars au perfectionnement des compétences, à l’éducation et aux infrastructures. En outre, notre plan pour le développement responsable des ressources inclut une résolution à consulter les peuples autochtones en temps opportun et de manière plus uniforme, plus responsable et plus pertinente au sujet des projets d’exploitation des ressources naturelles.

Le plan prévoit, premièrement, l’intégration de la consultation auprès des Autochtones au nouveau processus d’évaluation environnementale et au nouveau processus réglementaire; deuxièmement, l’affectation de 13,6 millions de dollars répartis sur deux ans pour soutenir les consultations auprès des Autochtones concernant les projets; troisièmement, la désignation d’un ministère ou d’un organisme responsable comme unique coordonnateur des consultations de l’État pour chaque examen de projet de ressources; quatrièmement, la négociation avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin d’harmoniser le processus fédéral et les processus provinciaux et territoriaux et d’accroître la participation des groupes autochtones; et cinquièmement, la valorisation de relations positives et à long terme avec les collectivités autochtones pour que les Autochtones puissent participer davantage aux retombées directes et indirectes des nouveaux projets de ressources.