Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands)
2021-06-01 22:09 [p.7810]
Monsieur le Président, je tiens d’abord à reconnaître que je suis sur le territoire du peuple W_SÁNEC. Je vais m’exprimer en SENCOTEN, et je lève les mains au ciel pour rendre hommage aux gens de ce peuple.
[La députée d’exprime en SENCOTEN.]
[Traduction]
En particulier, je lève les mains au ciel pour rendre hommage aujourd’hui à l’un de mes amis les plus chers, un citoyen de ma circonscription qui est également mon député provincial. Ce soir, je n’utiliserai pas mes propres paroles, mais les siennes. Adam Olsen est membre de la nation tsartlip. Il a prononcé ces paroles hier à l’Assemblée législative de la Colombie-Britannique:
Nous savons que si ces enfants avaient été non pas autochtones, mais européens, nous n’aurions pas tant tardé à agir. […] en notre for intérieur, nous savons que, dans notre société, le fait est tout simplement que […] certains enfants sont moins importants.
Nous savons que, sous la façade reluisante et heureuse du Canada […] se cache un passé grotesque et honteux. Depuis 30 ans, les membres de ma famille racontent ce qu’ils ont vécu dans ces établissements ignobles. Depuis 30 ans, on tait leur histoire. Les membres de nos familles se font dire que [le Canada et] les Canadiens […] ne veulent pas entendre leur histoire. On leur dit de cesser de mentir. On leur dit de cesser leurs exagérations.
Notre institution a publié une déclaration déplorant les proportions inimaginables de cette tragédie. C’est une caractérisation incroyablement regrettable de la situation que nous vivons. Pour les Autochtones, cette nouvelle n’est ni étonnante ni inimaginable. Elle vient confirmer le traumatisme que nos familles endurent depuis des générations […]
Alors que nous sommes toujours aux prises avec le meurtre et la disparition de femmes, de filles et d’enfants autochtones, que nous suspendons des robes rouges en reconnaissance de notre réalité actuelle, la découverte à Kamloops [nous rappelle] que cette histoire n’a rien de nouveau. Elle habite les pensées, voire les cauchemars des membres de nos familles depuis 130 ans. C’est la terreur avec laquelle nos ancêtres ont vécu.
La seule raison qu’il y aurait de qualifier la situation d’inimaginable serait que ces établissements, ces gouvernements de la Couronne […] et les gens qui ont occupé ces Chambres dans le passé soit n’ont pas écouté nos témoignages soit s’en fichaient complètement, la réalité dans notre pays étant que certains enfants sont moins importants. Dans les deux cas, c’est terrible!
Il n’y a rien à imaginer pour ceux qui ont prêté attention. Nos aînés autochtones et nos familles racontent les sombres détails de leur expérience dans les pensionnats depuis des décennies. La Commission de vérité et réconciliation en a fait état.
Vous n’avez pas besoin de vous l’imaginer. Il vous suffit d’y croire et de vous en soucier suffisamment pour agir avec le même empressement que s’il s’agissait de votre enfant qui n’était pas revenu chez vous après l’école, comme si votre enfant était allé à l’école et n’en revenait pas, comme s’il n’était pas là lorsque vous allez le chercher […]
On attribue souvent à Duncan Campbell Scott, superintendant adjoint des Affaires indiennes de 1913 à 1932, l’expression « Tuer l’Indien pour sauver l’homme » […]
Les pensionnats étaient un outil essentiel au processus visant à « tuer l’Indien », pour reprendre les paroles de M. Scott. Séparer délibérément les familles en envoyant de force les enfants dans des pensionnats était un moyen d’accélérer le processus consistant à dépouiller les Autochtones de leurs terres et de leurs ressources […]
Dans nos familles, il y a toujours eu des histoires de membres de la famille qui ne sont jamais revenus chez eux, d’enfants décédés au pensionnat et enterrés là-bas, les familles à peine informées, voire nullement informées […]
J’aimerais pouvoir dire que les enfants autochtones ne sont plus arrachés de force à leur communauté, mais, je ne le peux pas. J’aimerais pouvoir dire que les Autochtones ne sont pas considérablement surreprésentés parmi les personnes tuées par des policiers, dans le système de justice pénale, parmi les victimes de l’itinérance, du suicide, de la dépendance et de l’intoxication par les drogues, toutes des statistiques dans lesquelles nul ne souhaite être surreprésenté […]
Nous devons cesser de prétendre que nous n’étions pas au courant. Nous devons cesser de prétendre que la situation était mieux qu’elle ne l’était. Nous devons cesser d’agir comme si nous avions gagné honnêtement cette richesse, car ce n’est pas le cas. Ces terres et ces ressources dont dépend le gouvernement de la Couronne proviennent de la dépossession des Autochtones. Depuis des décennies, le gouvernement provincial [et j’ajouterai le gouvernement fédéral] jouit des terres et des ressources obtenues grâce aux pensionnats et à d’autres politiques honteuses […]
Je suis si reconnaissant de la réaction incroyable du public à cette tragédie que vivent nos parents de Kamloops et de la région intérieure. Je suis reconnaissant que notre famille, nos amis et nos voisins exigent […] que le gouvernement réponde comme si c’était nos enfants qui n’étaient pas rentrés à la maison après l’école.
C’est effectivement un lourd fardeau, mais nous pouvons alléger ce fardeau si nous le portons tous ensemble. HÍSW_?E SIÁM.