Loi sur la réforme de la non-responsabilité criminelle (projet de loi C-54)

Elizabeth May Monsieur le Président, je remercie le député de Mont-Royal de son intervention et, bien entendu, je lui sais gré de nous faire profiter de son expérience particulière puisque c’est lui, lorsqu’il était ministre de la Justice, qui a institué le cadre législatif applicable à la non-responsabilité criminelle, il y a huit ans.

Bien sûr, on conçoit difficilement un cas de figure où nous disposerions des données nécessaires pour analyser la situation. Cependant, j’ai instinctivement l’impression que, si c’était le cas, nous constaterions que le problème découle essentiellement de notre incapacité à adopter, dans toutes les sphères de la société, une approche globale par rapport à la santé mentale, de manière à prévenir les actes et les crimes violents que commettent une toute petite minorité de personnes atteintes de troubles mentaux. Après tout, nous savons que seule une infime minorité de toutes ces personnes sont impliquées dans des situations semblables, même si les conséquences sont désastreuses lorsque cela survient.

Tout cela ne donne-t-il pas à penser qu’il serait plus logique de se concentrer sur la prévention de ces situations rarissimes au lieu de chercher à garder indéfiniment quelques personnes derrière les barreaux et à trouver des failles à un système dont rien ne laisse supposer qu’il soit déficient?

Irwin Cotler : Monsieur le Président, je suis d’accord. Le projet de loi s’attaque au problème dans une optique de châtiment plutôt que dans une optique de prévention, une façon de faire qui semble malheureusement devenir la norme. Puisqu’on parle ici de personnes atteintes de troubles mentaux, la prévention est essentielle.

Il est regrettable que les amendements que j’ai proposés pour le projet de loi C-10 afin de favoriser le traitement des délinquants atteints de maladie mentale plutôt que leur incarcération et la prévention de la criminalité plutôt que le châtiment aient été rejetés par le gouvernement, et ce, même s’ils n’avaient pour seul but que d’améliorer et de protéger la sécurité publique, les raisons mêmes invoquées ostensiblement par le gouvernement pour justifier le projet de loi C-10.

La prévention éliminerait en fait le besoin de protéger la sécurité publique: elle réduirait le nombre de victimes, traiterait mieux les délinquants dans une optique de réinsertion sociale, et traiterait de façon appropriée les personnes qui ne sont pas considérées comme étant des délinquants et qui ne sont pas réputées criminellement responsables, en particulier dans le régime relatif à la non-responsabilité criminelle.