1.15 Agriculture et aliments

Pendant des siècles, les exploitations agricoles familiales ont constitué les assises de notre société et de notre économie. Au cours des cinq dernières décennies, les politiques fédérales, les subventions et les nouvelles technologies ont transféré la production alimentaire des petites exploitations familiales écologiquement durables aux grandes firmes agroalimentaires. Ce virage a effectivement donné aux multinationales le contrôle de notre approvisionnement alimentaire. Entre temps, les exploitants agricoles doivent de plus en plus s’assurer de gagner des revenus d’appoint pour survivre.

Notre sécurité alimentaire est directement menacée par les firmes agroalimentaires lorsque les fermes industrielles entassent les poulets, les dindes, les vaches et les porcs dans des conditions horribles et de mauvaise hygiène. Ces pratiques créent les conditions idéales pour l’éclosion de menaces graves pour notre santé, des épinards toxiques à la maladie de la vache folle, en passant par la grippe porcine. Les animaux sont souvent gorgés et injectés de produits chimiques et d’hormones, tandis que nos cultures sont aujourd’hui génétiquement modifiées et traitées aux pesticides.

Pendant ce temps, l’Agence canadienne d’inspection des aliments est aux prises avec un problème de crédibilité. Mandatée pour réglementer la sécurité des aliments tout en faisant la promotion des produits alimentaires canadiens au Canada et à l’étranger, l’Agence est en situation de conflit d’intérêts. Ce manque de crédibilité, ajouté au manque de préparation, explique le retard à émettre un avis lors de la crise de la listériose attribuable à des produits de viande froide Maple Leaf en 2008 qui a entraîné la mort de 22 personnes ou lors du scandale de la viande de l’entreprise XL Beef en 2012. Le rapport de l’inspectrice indépendante Sheila Weatherill sur la crise de la listériose (ancienne chef du sréseau de santé à Edmonton) soulignait l’augmentation des risques à la santé et à la sécurité de grandes usines de préparation d’aliments. Cependant, les recommandations portaient seulement sur plus d’inspections et de nettoyage avec produits chimiques au lieu d’une réforme du système alimentaire afin d’encourager l’exploitation de plus petites entreprises avec une traçabilité améliorée.

À peine remis des effets de la crise de la listériose, un mémo interne de l’Agence canadienne d’inspection des aliments révélait aux Canadiens que le gouvernement Harper planifiait de réduire le nombre d’inspecteurs. L’inspecteur qui a mis la main sur ce mémo du Conseil du Trésor qui soulignait les compressions envisagées (d’un serveur partagé à l’Agence) et qui l’a remis à son syndicat a été congédié.

La santé de la population canadienne aujourd’hui et demain repose sur la production d’aliments nutritifs durable sur le plan de l’environnement. Nous croyons que l’agriculture biologique locale doit contribuer à atténuer et à renverser les changements climatiques, à assurer la sécurité alimentaire, à rétablir la santé des sols, à améliorer la santé humaine, à protéger nos ressources hydriques et à offrir aux citoyens des moyens de subsistance durables. Nous devons restructurer nos marchés agricoles afin d’assurer la subsistance de l’agriculture et de permettre aux exploitations familiales de recevoir leur juste part du dollar de consommation alimentaire. Nous développerons l’agriculture locale à petite échelle et soutiendrons une transition rapide vers l’agriculture biologique plutôt que de verser des subventions onéreuses aux industries des produits agrochimiques, de production alimentaire industrielle et de cultures génétiquement modifiées.

Les gens doivent pouvoir se procurer des aliments sains, et les choix alimentaires les plus sains sont des aliments locaux. Avec les inquiétudes croissantes à l’égard de l’instabilité économique et climatique, il est d’autant plus important d’assurer la fiabilité de l’approvisionnement alimentaire national. Les exploitations agricoles familiales de petite et moyenne envergure constituent le meilleur régime de production alimentaire – fiable, de bonne qualité et économique – aujourd’hui et pour les lendemains incertains.

L’infrastructure requise pour soutenir l’agriculture locale disparaît rapidement. Les grandes sociétés et les opérations centralisées délogent de plus en plus les petites infrastructures communautaires – des abattoirs aux élévateurs à grains, en passant par les conserveries. La perte de contrôle sur les moyens de production a obligé plusieurs exploitants agricoles à abandonner l’agriculture. Les verts appuient les exploitations agricoles familiales parce qu’elles reconnaissent leur responsabilité en matière de gestion environnementale et produisent des aliments nutritifs de façon efficace. Les exploitations agricoles familiales sont les principales unités de production. Les politiques canadiennes en matière d’agriculture doivent être conçues pour que les exploitations familiales demeurent économiquement viables. Nous appuyons la participation active des exploitants agricoles du Canada aux marchés d’exportation lorsque cela ne compromet pas leur rôle principal – procurer des aliments sains aux marchés intérieurs et assurer le maintien du capital-ressource agricole du Canada. Nous soutenons la sensibilisation des consommatrices et des consommateurs canadiens afin qu’ils valorisent et préfèrent les produits locaux.

Les députés verts assureront le développement d’une Politique nationale en matière d’agriculture et d’alimentation en vue d’atteindre les objectifs suivants :

  • Améliorer la salubrité des aliments et renforcer la santé nutritionnelle :
    • Modifier le mandat de l’Agence canadienne d’inspection des aliments pour éliminer toute obligation de promouvoir les entreprises agroalimentaires canadiennes, en veillant à ce que son mandat porte exclusivement sur la salubrité des aliments, et pour augmenter ses capacités d’inspection et de surveillance.
    • Éliminer les conflits d’intérêts en supprimant la représentation d’entreprises alimentaires et agricoles d’organismes consultatifs fédéraux sur les politiques agroalimentaires
    • Légiférer pour étiqueter le sodium, le sucre et les gras trans sur les produits alimentaires.
    • Réglementer la quantité de gras trans dans notre approvisionnement alimentaire.
    • Éliminer la déduction fiscale des publicités de malbouffe qui vise les enfants.
    • Imposer une redevance aux fabricants de boissons sucrées, affectant leurs revenus pour financer des initiatives de vie saine.
    • Assurer la qualité et la salubrité des aliments en renforçant la surveillance des pesticides, des herbicides, des fongicides, des hormones de croissance, des antibiotiques non thérapeutiques et des insecticides dans la production, la transformation et le stockage des aliments en vue de réduire systématiquement les résidus décelables jusqu’à ce qu’ils atteignent des niveaux indécelables.
    • Établir des programmes de dîners scolaires subventionnés par le gouvernement fédéral, mais dirigés par les collectivités, dans l’ensemble du Canada pour veiller à ce que nos enfants aient accès chaque jour à des aliments sains de leur localité et puissent se familiariser avec la production d’aliments durable et apprendre à manger sainement.
    • Renforcer les programmes canadiens de protection des végétaux et d’hygiène vétérinaire avec des mesures visant à assurer l’intégrité des produits alimentaires de la ferme.
    • Améliorer et renforcer les Normes canadiennes de certification en agriculture biologique.
    • Fournir une aide de transition aux exploitants qui se convertissent à l’agriculture biologique certifiée.
    • S’assurer que les aliments destinés à l’alimentation de ruminants ne contiennent aucun sous-produit animal.
    • Renforcer les tests de dépistage de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) en mettant en œuvre le dépistage obligatoire (sur chaque animal tué) aussitôt que la procédure de dépistage de l’ESB dans les tests sanguins sera perfectionnée.
    • (Remarque : Veuillez consulter la section 4.7 Promotion de la santé pour plus de détails sur les aspects de la promotion de la santé énumérés dans les mesures suivantes.)
  • Assurer la sécurité alimentaire par le biais des mesures suivantes :
    • Instaurer un système qui assure l’autonomie alimentaire régionale dans l’ensemble du Canada au moment même où nous adoptons l’agriculture biologique comme principal modèle de production.
    • Appuyer le « défi de 200 kilomètres » (qui consiste à manger des aliments cultivés dans un rayon de 200 kilomètres de chez soi) par le biais du développement des marchés de producteurs et d’activités de tourisme culinaire local.Promouvoir les toits verts, la culture d’espaces verts urbains à des fins agricoles, la production alimentaire dans les villes et banlieues et les jardins communautaires.
    • Protéger le droit des exploitants agricoles à récupérer leurs semences.
    • Promouvoir les banques de semences patrimoniales et les programmes d’échanges de semences.
  • Prévenir la mainmise des intérêts industriels sur la chaîne alimentaire par le biais des mesures suivantes :
    • Réformer la réglementation de l’agriculture pour remettre en question la concentration industrielle.
    • Veiller à ce que les paiements de soutien agricole soient octroyés en fonction de l’exploitation (et non de la production) pour soutenir davantage d’exploitations et d’exploitants agricoles.
    • Privilégier les processus agricoles biologiques comme moyens d’améliorer la rentabilité et la durabilité des exploitations agricoles.
  • Soutenir les marchés d’alimentation locaux par le biais des mesures suivantes :
    • Aider les localités sans agriculture à grande échelle à développer des règlements en matière de salubrité des aliments spécifiques de ces localités, qui respectent les normes nationales sans toutefois placer un fardeau financier exagéré sur les entreprises de transformation alimentaire et les exploitants locaux.
    • Aider à rétablir l’architecture de la production alimentaire locale dans les conserveries, les abattoirs et lors de tout autre procédé de transformation des aliments à valeur ajoutée.
    • Favoriser et soutenir la consommation d’aliments locaux en incitant les chaînes d’épiceries à octroyer un volume de présentation adéquat pour les produits des exploitations et des entreprises de transformation locales.
  • Renforcer la recherche agricole par le biais des mesures suivantes :
    • S’assurer que les nouvelles variétés de cultivars et de races animales demeurent dans le domaine public.
    • Rediriger la recherche subventionnée par l’État actuellement consacrée à la biotechnologie et aux pratiques agricoles énergivores vers la production alimentaire biologique.
    • Augmenter les subventions de l’État pour la recherche sur les pratiques d’agriculture biologique.
    • Établir de nouvelles politiques pour la recherche privée pour faire en sorte qu’elle soit dans l’intérêt supérieur des exploitations familiales et des consommateurs.
    • Prévenir le brevetage de formes de vie.
    • Faire en sorte que les sociétés qui développent des cultures génétiquement modifiées soient responsables des dommages pouvant être causés par ces cultures.
  • Assurer le commerce équitable par le biais des mesures suivantes :
    • Privilégier le commerce équitable au niveau des exportations et des importations agricoles.
    • Faire en sorte que les régimes nationaux de gestion de l’offre assurent la stabilité des marchés intérieurs et la viabilité du revenu agricole et autoriser la production non réglementée pour les petites exploitations et les exploitations familiales qui vendent à des marchés locaux.
    • Revoir les répercussions de l’abolition de la Commission canadienne du blé et envisager de la rétablir pour veiller au commerce équitable des grains canadiens de haute qualité.
    • Éliminer la pratique du dumping international avec les pays en développement.
  • Mettre un terme à la perte de terres agricoles au profit du développement par le biais des mesures suivantes :
    • S’efforcer de négocier des solutions avec les provinces pour la préservation des terres agricoles à fort rendement partout au Canada.
    • Rétablir le programme de l’Inventaire des terres du Canada en lui accordant le budget nécessaire pour actualiser et maintenir à jour un registre exhaustif du potentiel et du mode d’utilisation des terres comme élément central de la planification locale.
    • Fournir des incitatifs fiscaux adéquats à d’autres ordres de gouvernement, y compris aux municipalités, pour leur permettre de préserver les terres agricoles dans leur champ de compétence.
  • Soutenir la bonne intendance de l’environnement par le biais des mesures suivantes :
    • Protéger et améliorer la qualité de nos cours d’eau, de nos lacs et de nos aquifères.
    • Rétablir les comités de rétablissement agricole des Prairies et réinstaurer leurs mesures de conservation.
    • Collaborer avec les provinces pour s’assurer que la totalité des déchets d’élevage est recyclée de manière sécuritaire et que la contamination de ruissellement agricole est évitée.
    • Mettre en place des programmes à frais partagés pour aider les exploitants à protéger les aires d’habitat faunique et les terres marginales, protéger la qualité de nos cours d’eau, lacs et aquifères, et protéger et améliorer la qualité de nos sols.
    • Créer un « Programme de mise en œuvre du plan de ferme environnemental » pour fournir de nouvelles sources de financement pour la mise en œuvre au niveau de la ferme.
  • Aider les exploitants agricoles à s’adapter aux changements climatiques par le biais des mesures suivantes :
    • Favoriser les pratiques agricoles qui augmentent la séquestration de carbone et diminuent les besoins en eau.
    • Fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour toutes les composantes de notre régime agroalimentaire et collaborer avec l’industrie afin d’élaborer des plans pour atteindre ces objectifs.
    • Restructurer les programmes canadiens de gestion des risques opérationnels pour aider les exploitants à faire face aux dangers climatiques, notamment dans les zones couvertes par l’aide aux sinistrés.