Le Parti vert du Canada, la coalition Save Our Seas and Shores et deux éminents scientifiques canadiens unissaient leurs voix aujourd’hui pour réclamer un moratoire sur l’exploration et le forage dans le golfe du Saint‑Laurent, à commencer par l’arrêt de la prospection sismique.
La chef du Parti vert et députée de Saanich—Gulf Islands Elizabeth May ainsi que Mary Gorman, fondatrice et porte-parole de la coalition Save Our Seas and Shores, Lindy Weilgart, agrégée de recherche en biologie à l’Université Dalhousie et spécialiste des impacts sismiques sur la vie marine, et Thomas Duck, professeur au département de physique et sciences atmosphériques de l’Université Dalhousie, ont également prié les Canadiennes et les Canadiens ainsi que les gouvernements provinciaux de la région de se joindre à eux pour freiner les conservateurs de Harper et leur programme agressif d’exploitation des hydrocarbures dans le golfe.
« Il faut rallier un maximum de Canadiennes et de Canadiens préoccupés par la situation ainsi que leurs représentants provinciaux pour réclamer un moratoire sur l’exploration pétrolière dans le golfe du Saint‑Laurent », a dit Elizabeth May. « Après avoir passé les derniers mois à catapulter son budget pro-pétrole et son mégaprojet de loi C‑38 aux Communes, le premier ministre Stephen Harper est convaincu que désormais, plus rien ne peut l’arrêter. Il faut lui montrer qu’il se met le doigt dans l’œil. »
L’élimination de la réglementation fédérale en matière d’exploitation extracôtière risque d’avoir des conséquences dramatiques dans le golfe du Saint‑Laurent, un écosystème extrêmement sensible abritant plus de 2000 espèces marines qui fraient et migrent tout au long de l’année, y compris le homard, le hareng, le crabe des neiges, le maquereau, le thon, la grande baleine bleue et la baleine noire – deux espèces menacées – la tortue luth et l’arlequin plongeur.
Les évaluations environnementales entourant les activités de forage d’exploration, qui posent autant de risques que le forage d’exploitation, ont été éliminées avec l’adoption de la nouvelle Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCEE 2012) par le truchement du projet de loi C‑38. Il y a lieu de noter que le pire déversement de pétrole de toute l’histoire de l’Amérique, celui de BP Macondo Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique, avait pour origine un puits d’exploration.
Les évaluations environnementales entourant les explosions sismiques ont également été éliminées. « Les mammifères marins et les poissons sont extrêmement perturbés par la prospection sismique. Les baleines peuvent s’échouer et mourir, souvent avec du sang qui s’écoule de leurs yeux; les dauphins peuvent entrer dans un état de paralysie, catatonique, et se noyer; les cellules auditives des poissons sont souvent entièrement détruites. Engendrer un tel niveau de destruction dans une région aussi productive et aussi riche sur le plan biologique que le golfe du Saint‑Laurent relève de la folie », a prévenu Lindy Weilgart.
Les conservateurs de Harper sont en voie d’éliminer toute la réglementation et toutes les protections environnementales fédérales pour accélérer le forage en mer, en dépit du fait que le golfe constitue une source de nourriture mondiale et régionale renouvelable et supporte une industrie de la pêche florissante – y compris des pêcheurs micmacs et acadiens – qui, avec l’industrie du tourisme, rapporte un milliard de dollars et crée environ 50 000 emplois connexes. Parallèlement, les conservateurs de Harper n’ont rien fait pour rehausser la limite de responsabilité de l’industrie des hydrocarbures, qui plafonne à 40 millions de dollars, ce qui n’est rien comparativement aux milliards injectés par BP dans le désastre du golfe du Mexique.
Les caractéristiques du golfe sont uniques, ce qui rend l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures particulièrement risquées. Les forts courants de marée qui circulent en sens antihoraire dans cette mer intérieure partiellement enclavée se déversent dans l’océan atlantique une fois par année seulement. Il n’existe aucun moyen efficace pour nettoyer un éventuel déversement de pétrole, puisque le golfe est situé dans l’une des régions les plus venteuses d’Amérique du Nord. Enfin, la trajectoire des courants signifie qu’un déversement de pétrole provoquerait des dommages sur cinq côtes provinciales (Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Île-du-Prince-Édouard, Québec et Terre-Neuve).
« En tant que propriétaires côtiers, nous nous sentons trahis et abandonnés par nos gouvernements, qui jouent à la roulette russe avec tout ce que nous avons gagné à la sueur de notre front, la valeur de nos propriétés et la valeur nette patrimoniale ainsi que la beauté naturelle de notre golfe, les activités récréatives qu’il nous permet de pratiquer et notre culture maritime unique au monde », a rappelé Mary Gorman.
« J’aimerais inviter officiellement le premier ministre Harper à faire son entrée au 21e siècle et lui rappeler que l’être humain n’est pas la seule espèce sur la planète. Ce sentiment de supériorité et cette arrogance anthropiques ont fait leur temps et une petite leçon d’humilité serait bien à propos et très bénéfique. Pendant que le reste du monde évolue, notre gouvernement s’accroche à la philosophie et aux modèles d’affaires du 20e siècle. C’était peur-être acceptable dans les années 1950, mais le monde a beaucoup évolué. Nous invitons le gouvernement du Canada à emboîter le pas au reste de la planète », a dit John Percy, chef du Parti vert de la Nouvelle-Écosse.
Ce programme d’exploitation d’hydrocarbures agressif prend place au moment où la capacité du gouvernement à surveiller les impacts négatifs est grandement diminuée. Le professeur Thomas Duck a tenu à rappeler l’ampleur de la réduction graduelle de la capacité scientifique d’Environnement Canada et de Pêches et Océans Canada : « Des politiques rationnelles sont efficaces lorsqu’elles sont fondées sur la science. Pourtant, les conservateurs de Harper ont démantelé l’essentiel de notre capacité en matière de surveillance des impacts de l’exploration et de l’exploitation des combustibles fossiles. L’élimination des évaluations et des suivis scientifiques – la guerre de Harper contre les preuves – constitue un grave danger pour la santé et la sécurité des Canadiennes et des Canadiens et leur environnement. »