Initiatives parlementaires – Loi sur la stratégie nationale relative à la maladie de Lyme

Elizabeth May : Monsieur le Président, aujourd’hui, j’ai le grand honneur de présenter en deuxième lecture ce projet de loi concernant une stratégie nationale relative à la maladie de Lyme. Lorsque nous sommes capables de travailler ensemble en tant que députés, tout est possible.

J’ai l’insigne honneur de présenter un projet de loi que je parraine. Si je le pouvais, j’effacerais mon nom et inscrirais celui de tous les députés. Il s’agit d’un véritable effort non partisan, comme en témoigne le processus législatif jusqu’à présent.

À l’étape de la première lecture, en juin 2012, c’est la députée d’Etobicoke-Nord qui a appuyé mon projet de loi. Elle a travaillé très fort dans bon nombre de dossiers liés à la santé. Aujourd’hui, j’ai l’immense honneur de voir mon projet de loi appuyé par le député d’Oakville, qui a lui-même défendu un certain nombre de causes en matière de santé. Je le félicite, ainsi que la ministre de la Santé et l’ensemble des députés conservateurs, d’avoir proposé le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues, ou Loi de Vanessa. J’ai hâte de voir ce projet de loi devenir loi. Ces mesures importantes prouvent que des particuliers peuvent faire évoluer les politiques publiques, et j’espère que c’est ce que nous ferons ici.

Il se trouve que le député d’Oakville s’est également engagé dans le dossier de la maladie de Lyme en rédigeant un avant-propos pour un livre canadien intitulé Ending Denial: The Lyme Disease Epidemic.

Dans cet esprit non partisan, l’opposition officielle, le Nouveau Parti démocratique, a été le premier parti à appuyer inconditionnellement mon projet de loi. Il y a quelque temps, la porte-parole néo-démocrate en matière de santé, la députée de Vancouver-Est, m’a informée que je pouvais compter sur le soutien de son parti. Sur le plan personnel, ce soutien compte énormément pour moi. Cela témoigne de l’importance de cette mesure législative.

La députée d’Edmonton—Spruce Grove, la ministre de la Santé, a également accepté de collaborer avec moi. Par conséquent, le projet de loi pourrait aboutir. Nous avons travaillé sur cette mesure législative et je m’attends à ce que certains amendements — que je qualifie d’utiles — soient présentés au comité. Cela augure bien de notre capacité de collaborer et d’obtenir des résultats positifs à l’égard de cette maladie.

De quoi s’agit-il? Toutes les personnes présentes à la Chambre savent que la prévalence de la maladie de Lyme augmente. Elle se propage par le biais d’une bactérie portée par les tiques, souvent les tiques à pattes noires et la tique du chevreuil, malgré que d’autres espèces de tiques commencent à en être porteuses. La bactérie Borrelia burgdorferi risque de causer une tragédie personnelle et est accompagnée d’un ensemble très inquiétant de symptômes.

Comme je l’ai mentionné, cette maladie se propage par les tiques et, comme nous l’avons vu, elle peut s’étendre à d’autres régions par l’intermédiaire d’oiseaux. L’aire d’habitat de ces tiques s’accroit sans cesse au Canada, et cela contribue à la progression des maladies à transmission vectorielle qui est anticipée en raison du réchauffement et de la crise climatiques.

Nous savons que la prévalence de la maladie a augmenté. Plusieurs personnes ont été choquées lorsque, à l’été 2013, les Centers for Disease Control and Prevention, à Atlanta, en Géorgie, a publié des estimations révisées de la prévalence de la maladie de Lyme aux États-Unis. Selon les nouvelles estimations, la prévalence de cette maladie a décuplé. Autrement dit, il n’y aurait pas eu 30 000 nouveaux cas l’an dernier, mais plutôt 300 000. Ce rappel que la prévalence de la maladie de Lyme augmente arrive à point nommé pour le Canada.

Depuis 2009, la maladie de Lyme est une maladie à déclaration obligatoire; c’est tout à l’honneur de Santé Canada. Il est évident que nous savons que la maladie est présente au Canada, et les professionnels de la santé sont obligés de déclarer les diagnostics de maladie de Lyme. Nous savons également qu’elle est sous-déclarée. À l’heure actuelle, les médecins qui diagnostiquent la maladie de Lyme ont la responsabilité d’informer les autorités provinciales de la santé, lesquelles informent ensuite l’Agence de la santé publique du Canada. Or, à ce jour, seulement 310 cas ont été rapportés à l’échelle du Canada.

Je suis certaine que mes collègues des deux côtés de la Chambre savent que le nombre de cas signalés est plutôt faible, ne serait-ce que par ce que nous relatent les électeurs et par le nombre de pétitions présentées dans cette enceinte de la part de citoyens qui nous pressent de trouver une solution et réclament un traitement plus efficace et une cure. S’il nous est impossible d’estimer dans quelle mesure, exactement, le nombre de cas signalés est faible, je crois que plus nous sensibiliserons la populatio à la maladie, plus nous aurons une bonne idée de son incidence, comme ce fut le cas aux États-Unis.

Je présenterai rapidement ce que ferait cette mesure législative. Le projet de loi s’attaque, de diverses façons, au risque que pose la maladie de Lyme. Il vise à établir un système de surveillance nationale afin de résoudre le problème que je viens de soulever, c’est-à-dire que nous ne disposons pas toujours de renseignements fiables sur les zones endémiques et la prévalence de la maladie.

Il est également important de mieux sensibiliser la population à la maladie, voire d’établir des lignes directrices nationales ou du moins échanger les meilleures pratiques, afin de comprendre les défis que posent le diagnostic et le traitement.

Le projet de loi prévoit ce qui suit:

3.b) l’établissement de lignes directrices concernant la prévention, le dépistage, le traitement et la gestion de la maladie de Lyme, lesquelles contiennent entre autres la norme nationale de soins recommandée qui fait état des meilleures pratiques actuelles pour le traitement de la maladie de Lyme;

Le projet de loi exige également que le ministre de la Santé, en collaboration avec d’autres intervenants, crée un programme national reposant sur la création de matériel didactique en vue non seulement de mieux faire connaître la maladie, mais également d’appuyer les professionnels de la santé dans leur travail. Dans l’optique de créer un cadre national, le ministre de la Santé aurait l’obligation, dans les six mois suivant l’entrée en vigueur du projet de loi, de convoquer une conférence nationale réunissant les ministres provinciaux et territoriaux de la Santé ainsi que les intervenants décrits dans le projet de loi comme des représentants du milieu médical et des groupes de patients.

Je trouve très encourageant de voir que, même si le projet de loi C-442 n’en est qu’aux premières étapes du processus législatif, il a déjà reçu l’appui d’intervenants importants du milieu médical. Permettez-moi de remercier notamment Eric Mang, directeur des politiques en matière de santé et des relations gouvernementales du Collège des médecins de famille du Canada. Il a manifesté par écrit, à l’automne 2013, le soutien de son organisme à l’égard de la mesure législative, déclarant ceci:

Le [Collège des médecins de famille du Canada] appuie l’étude approfondie de l’impact sur l’économie et sur la santé de la maladie de Lyme afin d’assurer que les médecins ont les outils et les connaissances nécessaires à leur disposition. Les guides de pratiques produits dans le cadre de la stratégie devraient reposer sur l’apport des médecins de famille, et tous les professionnels en santé primaire devraient y avoir accès.

Encore plus récemment, le 27 février 2014, j’ai reçu avec enthousiasme une lettre de l’Association médicale canadienne et de son président, le Dr Louis Hugo Francescutti. Pour enrichir le débat à l’étape de la deuxième lecture, il est important que je cite une partie de cette lettre venant du milieu médical. Le président a écrit:

La maladie de Lyme peut être difficile à diagnostiquer étant donné que les signes et symptômes peuvent être non spécifiques et communs à d’autres maladies. Si la maladie n’est pas reconnue à un stade précoce, le patient risque de souffrir d’une maladie plus gravement débilitante et souvent plus difficile à traiter. Vu l’incidence croissante de la maladie de Lyme au Canada, l’éducation constante des professionnels de la santé et de la santé publique ainsi que l’établissement d’une norme nationale pour les soins peuvent améliorer l’identification, le traitement et la gestion de la maladie. Une conscience accrue des endroits où les tiques sont endémiques au Canada, ainsi que des renseignements sur la maladie et les mesures de prévention, peuvent aider les Canadiens à se protéger d’une infection. Une stratégie nationale pour la maladie de Lyme regroupant des représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, du milieu médical et de groupes de patients pourrait permettre de remédier aux préoccupations concernant la recherche, la surveillance, le diagnostic, le traitement et la gestion de la maladie. En outre, les mesures de prévention de la santé publique élargiraient notre base de connaissances et amélioreraient les soins et les traitements de ceux qui souffrent de la maladie de Lyme.

L’appui de ces deux importantes associations de professionnels du milieu médical, l’Association médicale canadienne et le Collège des médecins de famille du Canada, me donne espoir de rallier les députés de tous les partis. En demandant la tenue d’une conférence nationale, le projet de loi propose une démarche concertée qui mobilise à la fois les autorités fédérales et provinciales en matière de santé, la communauté médicale — docteurs, professionnels de la santé, infirmières, ces gens qui tentent tant bien que mal de déceler et de diagnostiquer la maladie de Lyme — et les groupes représentant les patients, dont l’appel à l’aide demeure sans réponse et pour qui le présent projet de loi représente une première lueur d’espoir après ce qui se résume dans bien des cas à des années de souffrance. L’appui de la communauté médicale m’encourage énormément.

Je veux maintenant parler du soutien reçu de la part des patients. Il ne me serait jamais venu à l’esprit de présenter un projet de loi d’initiative parlementaire sur la maladie de Lyme si je n’avais pas rencontré autant de Canadiens atteints de celle-ci. La première victime de cette maladie que j’ai connue est mon amie Brenda Sterling, du comté de Pictou, en Nouvelle-Écosse. Elle m’a dit qu’elle avait été mordue par une tique et que maintenant, elle était confinée à son fauteuil roulant, pratiquement invalide. La nouvelle m’a stupéfiée. Avant de rencontrer Brenda, je ne savais pas que la maladie de Lyme pouvait être aussi grave, mais Brenda m’a ouvert les yeux.

Je suis ensuite déménagée dans la circonscription de Saanich—Gulf Islands, à Sidney plus précisément, où j’ai rencontré de nombreuses autres personnes atteintes de la maladie de Lyme, dont des enfants. Il est navrant de voir une belle et brillante jeune femme comme Nicole Bottles devoir abandonner ses études. Pas à cause de son fauteuil roulant mais plutôt en raison de la confusion que cause parfois dans son cerveau la maladie de Lyme. Elle a de la difficulté à se concentrer et n’a pas pu poursuivre ses études. Je crois que bon nombre d’entre vous l’avez rencontrée lorsque sa mère, Chris Powell, et elle sont venues à Ottawa pour faire la promotion du projet de loi C-442. Pour elles, cette mesure législative permettrait d’accroître la sensibilisation à la maladie.

Je suis extrêmement reconnaissante à James, à Michael et à d’autres jeunes électeurs. Je pense notamment à Eric et à sa famille. Lorsque je songe aux raisons pour lesquelles j’ai choisi ce projet de loi, Eric et sa famille y sont pour beaucoup. Son beau-père était un de mes grands supporteurs, et je cherchais un moyen de le remercier de son soutien. C’est grâce à Fraser, entre autres, si j’ai choisi de présenter une mesure législative qui pourrait améliorer le sort de milliers de gens.

Tandis que nous nous penchons sur ce projet de loi, il y a un certain nombre de choses que j’aimerais que nous gardions à l’esprit. L’une d’elles, c’est que nous ne devrions jamais avoir peur d’aller dehors. Depuis la présentation du projet de loi, certaines personnes m’ont dit qu’il allait créer une phobie du plein air. Je tiens à souligner que ce n’est pas du tout mon intention.

Je partage l’opinion des personnes qui pensent que le manque de nature représente une menace réelle pour nos enfants. Ces derniers doivent sortir et se mettre en contact avec la nature sauvage. Ils doivent aller à l’extérieur. Cela accroîtra leurs capacités d’apprentissage, leurs aptitudes et leur maturité affective. Passer du temps en plein air est une très bonne chose pour les enfants.

Nous connaissons maintenant bien les problèmes relatifs à l’appauvrissement de la couche d’ozone, situation que le Protocole de Montréal est en train de renverser. Au fil des années, nous avons pris l’habitude de poser des questions sur le niveau de rayonnement ultraviolet, de porter des chemises à manches longues, d’appliquer un écran solaire et de porter un chapeau à large bord, ce qui n’était pas le cas quand j’étais enfant. Ce sont des mesures de prévention sensées.

Nous devons intégrer une dose de bon sens à nos activités quotidiennes. Avant que nos enfants aillent jouer à l’extérieur, nous devons leur demander de rentrer leurs bas de pantalon dans leurs chaussettes. Puis, quand ils reviennent à la maison, nous devons vérifier rapidement s’ils n’ont pas été mordus par une tique. Ce sont des mesures de prévention sensées.

La bonne nouvelle, c’est que la maladie de Lyme est évitable. C’est pour cette raison qu’il est tellement logique de mettre en place un cadre fédéral. Si nous connaissons la maladie et que nous sommes vigilants, nous pourrons l’éviter. Si nous la contractons quand même, mais que le diagnostic est rapide et correct, le traitement donne des résultats. Le traitement n’a pas besoin d’être long, et la personne malade pourra guérir complètement et se sentir en parfaite forme.

Finalement, j’aimerais donner un peu d’espoir à ceux devant composer tous les jours avec les symptômes débilitants de cette maladie. Si nous accordons une attention réelle à cette maladie et que nous continuons à mener des recherches, nous pourrons trouver des mesures de traitement qui aideront tous les patients atteints de la maladie de Lyme.

Je suis redevable à tous les députés qui sont venus ici ce matin à l’étape de la deuxième lecture, et je les remercie de leur appui. Grâce à leur aide, ce projet de loi deviendra loi.