Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands)
2020-11-20 10:49 [p.2176]
Madame la Présidente, je souhaite d’abord préciser que je m’adresse aujourd’hui à la Chambre depuis le territoire traditionnel du peuple WSÁNEC, que je salue d’ailleurs. Hych’ka Siem. Je tiens également à saluer l’ensemble de mes collègues.
Je tiens à remercier tout particulièrement le député de Parry Sound—Muskoka et le caucus conservateur d’avoir organisé les interventions en matinée, de façon à me donner l’occasion de discuter du projet de loi C-3. Mon intervention a permis de mettre en lumière un thème dont je veux parler à propos du projet de loi, qui devait d’emblée exclure la partisanerie. L’opposition officielle a eu la générosité de m’accorder plus de temps pour prendre la parole ce matin, alors que nous nous réunissions pour appuyer un projet de loi très prometteur.
Bien entendu, nous avons souligné à maintes reprises l’origine tout à fait non partisane de l’initiative qui, comme nous le savons tous, a été proposée par Rona Ambrose. Il s’agit d’un texte législatif extrêmement important. Elle l’a présenté lorsqu’elle était chef intérimaire du Parti conservateur, puis il a été adopté par le Parlement. Hélas, comme on le sait, le projet de loi a été bloqué au Sénat.
Le fait que cette mesure législative revienne en tant que projet de loi du gouvernement libéral est extrêmement encourageant. C’est un important projet de loi. Aujourd’hui, je vais me concentrer sur certains aspects pour expliquer aux Canadiens les améliorations qui ont été apportées, d’abord à la mesure initiale, puis une deuxième fois dans un esprit non partisan.
Bien sûr, le projet de loi est né de nombreuses décisions qui ont suscité la colère chez les citoyens canadiens. Les hommes, les femmes et les personnes non binaires se sont tous demandé: « Pour l’amour du ciel, comment est-ce possible? » Comment des juges peuvent-ils dire des énormités au tribunal — et j’en ai déjà parlé à la Chambre —, comme dans le cas tristement célèbre du juge qui a demandé pourquoi la victime n’avait pas serré les genoux?
Les juges entretiennent des préjugés au détriment des victimes, des préjugés selon lesquels une femme ayant subi une agression sexuelle ne réagirait pas d’une certaine façon ou qu’elle ferait telle ou telle chose. Des juges sans aucune formation sur le sujet s’imaginent comment ils réagiraient dans des circonstances semblables, puis utilisent ces hypothèses pour remettre en question la véracité des affirmations de la victime. C’est ce type de comportement qui est à l’origine du projet de loi.
Quoi qu’il en soit, je peux dire maintenant — la députée de Winnipeg-Centre vient juste de le faire remarquer —, que bien des mesures contenues dans ce projet de loi auraient pu être tirées d’un rapport qui n’avait pas encore été écrit quand Rona Ambrose a présenté ce projet de loi en tant que projet de loi d’initiative parlementaire. Il n’avait pas encore été écrit parce que l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées n’avait pas fait l’objet d’un rapport.
Je voudrais attirer l’attention des députés sur les recommandations 16, 17 et 18 et sur la partie 3 du rapport de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, qui mettent en évidence ces mêmes facteurs que les juges et le système judiciaire ne comprennent pas et ne prennent pas en compte. Ils ne prennent pas au sérieux les agressions sexuelles et les niveaux élevés de violence auxquels les femmes autochtones sont soumises. Ils ne prennent pas cela au sérieux et ne comprennent pas qu’ils doivent en apprendre davantage. C’est ce dont parle ce projet de loi.
Au moment où le projet de loi a été présenté, nous étions très occupés, en tant que société, à parler de la violence contre les personnes racialisées, les Noirs, les Autochtones, les personnes de couleur, qui sont plus exposés à la violence et plus à risque — de manière disproportionnée — d’être incarcérés.
Je tiens encore à répéter l’observation non partisane que ce projet de loi a été amélioré grâce au travail qui a été réalisé en comité. Au début, je croyais que la mesure législative jouissait de l’appui de tous les députés et j’ai suggéré que nous devions l’adopter le plus rapidement possible. Je suis désolée si j’ai pris des gens par surprise. Je constate maintenant que les réunions en comité n’ont pas été du temps perdu.
Le Caucus des parlementaires noirs est relativement nouveau et il a été mis sur pied en réponse aux actes horribles de racisme et de violence commis récemment par des policiers, une situation qui a secoué le monde entier. Le décès de George Floyd est la goutte qui a fait déborder le vase et c’est à ce moment que le Caucus des parlementaires noirs a été créé.
Il s’agit d’un caucus multipartite qui a pris l’initiative de lancer l’idée que, bien que le projet de loi ait pour objectif de faire en sorte que les juges obtiennent de la formation sur la manière dont les femmes vivent la violence sexuelle et sur la façon dont les témoignages devraient être reçus et de les amener à comprendre que les femmes vivent à nouveau un traumatisme à cause de ce processus, nous pourrions peut-être profiter de l’occasion pour élargir encore davantage la formation donnée aux juges.
Pour les Canadiens qui nous regardent, je tiens à dire que le projet de loi comprend maintenant des dispositions qui précisent que la formation continue portant sur des questions liées aux agressions sexuelles et au contexte social que doivent suivre les juges doit aussi tenir compte du racisme et de la discrimination systémiques. Encore une fois, il s’agit d’une décision qui a été prise par plusieurs partis et qui vise à améliorer le projet de loi.
Je suis particulièrement fière du travail de la députée de Fredericton, qui est membre du caucus du Parti vert. Son amendement a été accepté. De nombreux Canadiens ignorent peut-être que, étant donné que le Parti vert compte moins de 12 députés, ses députés ne sont pas autorisés à siéger aux comités. Néanmoins, depuis l’époque de Stephen Harper, il existe un nouveau processus. Nous pouvons voir ce nouveau processus comme une occasion ou comme une contrainte qui nous oblige à être présents au cours de l’étude article par article au comité, mais il vaut vraiment la peine quand un amendement est adopté.
Dans ce cas-ci, grâce au travail de la députée de Fredericton, le projet de loi a été amendé pour que le libellé concernant les groupes de gens qui donnent des conseils sur le contenu de la formation des juges comprenne « les dirigeants autochtones et les représentants des communautés autochtones ». Il s’agit d’une citation tirée de la mesure législative qui comprend le nouvel amendement grâce à la députée de Fredericton.
Le projet de loi montre ce que nous pouvons accomplir quand nous donnons le meilleur de nous-mêmes, que nous décidons qu’une question est non partisane et que nous adhérons au principe que ma mère m’a inculqué, soit que nous pouvons accomplir tout ce nous voulons si nous ne nous soucions pas de savoir qui recevra le mérite. Dans le cadre du présent processus, le mérite revient à tous les participants.
Je remercie encore une fois Rona Ambrose d’avoir proposé cette mesure législative. Je remercie le ministre de la Justice et le gouvernement actuel de nous ramener cette mesure sous la forme d’un projet de loi émanant du gouvernement. Je remercie tous ceux qui ont participé à ce projet de loi, qui est passé entre plusieurs mains, toutes utiles. Elles sont en guérison, elles sont féministes, elles sont racialisées. Nous comprenons tout de même qu’il faille faire mieux.
Ce projet de loi constitue un premier pas. Nous devons en faire davantage pour assurer des services adéquats aux femmes qui ont été victimes de violence sexuelle. Les députés qui cherchent un modèle pour leur communauté peuvent se tourner du côté de la Colombie-Britannique, où le centre des victimes d’agression sexuelle de Victoria constitue un parfait exemple de la façon d’aider les victimes d’agression et de violence sexuelles. Nous devons en faire davantage dans nos communautés et nous devons en faire davantage en tant que parlementaires.
Je suis heureuse d’avoir pu me prononcer ce matin sur le projet de loi. J’espère qu’il sera adopté à l’unanimité.
Kevin Lamoureux (Winnipeg North)
2020-11-20 10:57 [p.2177]
Madame la Présidente, c’est incroyable ce que la Chambre des communes peut faire. La semaine dernière, tous les partis se sont mobilisés, les verts, les néo-démocrates, les conservateurs et les libéraux, pour adopter relativement rapidement le projet de loi sur la subvention salariale et l’aide au loyer, et depuis, ce projet de loi a franchi les étapes au Sénat et reçu la sanction royale.
Nous étudions maintenant un autre projet de loi qui semble jouir lui aussi de l’appui des verts, des néo-démocrates, des conservateurs et des libéraux. Espérons qu’il sera renvoyé au Sénat plus tard aujourd’hui. C’est incroyable à quel point la Chambre des communes peut être constructive lorsque nous collaborons et travaillons ensemble. Qu’en pense l’ancienne chef du Parti vert?
Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands)
2020-11-20 10:58 [p.2177]
Madame la Présidente, quiconque me connaît ne sera pas surpris de m’entendre dire que, selon moi, nous produisons nos meilleurs résultats lorsque nous mettons de côté la partisanerie. Lorsque nous nous rallions tous à une cause commune, le Parlement du Canada représente le meilleur du Canada. Lorsque les échanges de coups bas deviennent monnaie courante à la période des questions, cela déçoit les Canadiens.
Si nous nous considérions d’abord et avant tout comme des parlementaires et réprimions le politicien en nous, les Canadiens seraient fiers de nous. Lorsqu’il a été élu au fauteuil, le Président nous a invités à nous comporter d’une manière dont nos enfants, s’ils s’adonnaient à nous regarder, seraient fiers. Aujourd’hui est un bel exemple de ce dont nous sommes capables.