Les droits de la personne ont toujours été une valeur importante et chère aux yeux des Canadiennes et des Canadiens. Les récentes transgressions des droits de la personne au nom de la justice, du commerce et de la sécurité sont extrêmement préoccupantes. L’épisode le plus récent et le plus troublant est sans doute la décision de faire comme si la torture n’existait pas.
Elizabeth May, chef du Parti vert du Canada et députée de Saanich—Gulf Islands, est catégorique : « Les Canadiennes et les Canadiens ne veulent pas sanctionner la torture, peu importe les circonstances. Le gouvernement conservateur est complètement déphasé par rapport à l’opinion publique et aux valeurs canadiennes. »
Cette dernière transgression des droits de la personne constitue une volte-face pour le gouvernement Harper, qui insistait jadis pour que le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) rejette toute information susceptible d’être contaminée. À présent, le SCRS est invité à se servir de ces informations, même lorsqu’elles ont été obtenues par la torture. Fait encore plus troublant, le gouvernement affirme que des informations obtenues ainsi seraient non seulement communiquées à la police canadienne, mais également aux organismes de renseignements étrangers. Amnistie internationale (section canadienne) a vigoureusement dénoncé cette volte-face : « L’information obtenue par la torture n’a pas sa place au sein du système judiciaire, point à la ligne. »
Une enquête fédérale pilotée par le juge Dennis O’Connor dans l’affaire Maher Arar recommandait en 2006 que les politiques soient assorties de directives claires « visant expressément à éliminer toute possibilité de complicité du Canada dans la torture, à éviter le risque d’autres transgressions des droits de la personne et à assurer la responsabilisation. »
D’après une directive émise en décembre 2010, le gouvernement ordonne au SCRS de « faire de la protection de la vie et de la propriété son principe premier. » Il précise également que « dans des circonstances exceptionnelles où il existe une menace à la vie humaine ou la sécurité publique », le SCRS pourrait devoir « partager les renseignements les plus complets possible avec les autorités compétentes, y compris les informations basées sur des renseignements fournis par des agences étrangères qui peuvent résulter de l’utilisation de la torture ou de mauvais traitements. »
« Si la propriété est effectivement la mère de toutes les priorités, cela explique le mutisme du gouvernement face aux violations commises par les sociétés minières canadiennes et son appétit pour le commerce, sans égard aux droits de la personne », a dit le porte-parole des verts en matière de droits de la personne, Joe Foster. « Qu’en est-il des personnes victimes de ces actes de torture, qu’elles soient innocentes ou non? Et la menace qui pèse sur leur vie? Nos valeurs à l’égard des droits de la personne les plus fondamentaux ne sont plus que l’ombre d’elles-mêmes. On ne peut que supposer que le premier ministre sanctionne à présent la torture si cela peut lui permettre d’obtenir les informations qu’il désire. »
« Les autorités policières et les organismes de sécurité canadiens devraient tout mettre en œuvre pour écarter l’information obtenue par la torture, pas pour justifier des exceptions pour son utilisation », a ajouté Alex Neve, secrétaire général d’Amnistie internationale (section canadienne).
« Si nous voulons demeurer dans le giron des nations civilisées, il ne faut jamais chercher à justifier le recours à la torture, jamais », a conclu Foster.