Elizabeth May: Monsieur le Président, je donne suite à une question que j’ai posée au ministre de l’Environnement, il y a quelque temps, et à laquelle a répondu le secrétaire parlementaire. La question portait sur une politique mise en place en 2007 par le gouvernement actuel en vue de faire en sorte que les journalistes aient un accès limité aux scientifiques travaillant à la fonction publique fédérale. Cette mesure ne touche pas seulement l’environnement. Elle affecte les scientifiques qui travaillent au Conseil national de recherches du Canada, à Ressources naturelles Canada et à Pêches et Océans Canada.
Par exemple, l’Association canadienne des rédacteurs scientifiques, un organisme national, a écrit à tous les leaders fédéraux ce printemps pour leur dire qu’ils craignent que cette politique visant à museler les scientifiques explique le fait que l’organisme a noté une baisse de 80 p. 100 de la couverture médiatique concernant la crise climatique. Je ne donnerai que quelques exemples.
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Dans ma première question, j’ai mentionné le cas de Mme Kristina Miller. Cette scientifique qui travaille au ministère des Pêches et des Océans est très fière d’avoir publié les résultats de ses travaux de recherche scientifique dans une grande revue de renommée mondiale. Son ministère lui a interdit de parler aux médias.
Le 5 avril, une équipe d’Environnement Canada a publié dans le journal Geophysical Research Letters un article indiquant qu’il est très probable, voire inévitable, qu’une hausse très dangereuse des émissions mondiales de CO2 entraîne une augmentation de 2 °C de la température moyenne à l’échelle mondiale. On a interdit à ces scientifiques de s’adresser aux médias.
On a demandé aux scientifiques qui surveillaient les niveaux de radiation à la suite de la catastrophe nucléaire de Fukushima de fournir des données aux médias d’information sur leurs activités et sur les taux de radiation. Santé Canada a refusé de répondre à cette demande.
Nous connaissons également l’histoire presque comique du journaliste qui a essayé de contacter un scientifique du CNRC établi à Victoria, dont les recherches avaient été publiées à l’échelle internationale. Ces recherches portaient sur une inondation survenue il y a 13 000 ans. Ce chercheur n’avait pas le droit de parler aux médias.
Il y a aussi l’histoire très récente de M. David Tarasick, que ma collègue d’Etobicoke-Nord a évoquée il y a quelques instants seulement, qui a fait d’importantes recherches sur la surveillance de l’ozone. Ces travaux, de même que des recherches menées par d’autres collègues étrangers, ont été publiés dans la prestigieuse revue Nature. On signalait qu’un trou énorme dans la couche d’ozone s’était formée au-dessus de l’Arctique. Nous avons entendu parler du trou au-dessus de l’Antarctique, que l’on surveille et mesure depuis le milieu des années 1980. C’était toutefois le premier trou de cette taille jamais découvert au-dessus de l’Arctique. Fait intéressant, M. Tarasick a eu le droit d’accorder une entrevue aux médias. C’était une entrevue supervisée tout au long de laquelle des employés d’Environnement Canada ont été présents pour essayer de l’empêcher de répondre à certaines questions, mais l’entrevue a été accordée au moins.
Je trouve également inquiétant que, maintenant que je suis députée, pour la première fois de ma vie lorsque je contacte des scientifiques au sein du gouvernement du Canada, ils ne sont plus en mesure de communiquer avec moi. Ils m’ont expliqué par courriel qu’ils vont vérifier s’ils peuvent répondre à ma question. Dans certains cas, ce sont des collègues que je connais depuis des dizaines d’années et parce que je suis députée, ils n’ont pas le droit de répondre à mes questions.
Ma question à la secrétaire parlementaire est la suivante: Comment la population canadienne peut-elle avoir confiance dans un gouvernement qui ne permet pas à ses scientifiques de parler au public, un public qui est tellement fier de leurs recherches, qui veut que les recherches canadiennes sur les changements climatiques, l’appauvrissement de l’ozone et les sciences halieutiques continuent d’être avant-gardistes? Comment pouvons-nous avoir confiance?
Mme Michelle Rempel: Monsieur le Président, je voudrais m’en tenir aux faits et aux statistiques encore ce soir.
Premièrement, notre ministère permet sans cesse aux médias et aux députés d’en face d’avoir accès à nos spécialistes, et les ministres agissent en tant que porte-parole principaux de leurs ministères respectifs.
Depuis janvier 2011, des représentants d’Environnement Canada ont réalisé plus de 1 000 entrevues dans les médias. Dans le domaine scientifique, plus précisément, 600 entrevues ont été réalisées avec des scientifiques du ministère. Nous répondons de manière responsable aux demandes des médias, pour ce qui est de l’information scientifique. Seulement cette année, nous avons rencontré plus de 80 p. 100 des journalistes désireux d’avoir une entrevue, souvent avec de très courts préavis, et nous avons pu répondre à 98 p. 100 des demandes. C’est pourquoi les Canadiens savent qu’ils peuvent compter sur Environnement Canada pour obtenir l’information dont ils ont besoin.
Nous avons aussi à cœur de partager avec tous les Canadiens l’information sur leur environnement. Par conséquent, nous sommes fiers des réalisations de notre excellente équipe, à Environnement Canada, et des résultats qu’elle produit. Ces résultats sont, entre autres, un plan sectoriel d’harmonisation avec les États-Unis en vue d’une réduction de 17 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020, la prise en considération des préoccupations relatives à l’exploitation durable des sables pétrolifères et un plan de surveillance de calibre mondial axé sur la qualité de l’air, la biodiversité et l’eau. Nous poursuivrons la mise en oeuvre de ce plan avec notre équipe et nos partenaires des provinces, de l’industrie et d’autres groupes intéressés afin que les Canadiens aient l’assurance que notre industrie du pétrole et du gaz est exploitée de façon durable sur le plan environnemental.
Nous avons aussi travaillé en étroite collaboration avec les provinces, les territoires, Santé Canada, l’industrie et des groupes voués à l’environnement et à la santé pour mettre au point des choses comme le système national de gestion de la qualité de l’air. Ce système s’appuiera sur de nouvelles normes sur la qualité de l’air. Ainsi, la qualité de l’air sera améliorée dans l’intérêt de l’environnement et pour le mieux-être de tous les Canadiens. Ce sont là des résultats concrets produits par notre équipe, à Environnement Canada, et c’est l’information que nous communiquons aux médias.
Nous avons à cœur d’assurer la préservation du patrimoine naturel du Canada tout en restant conscients que nous devons dépenser judicieusement l’argent des contribuables et protéger la reprise économique fragile que connaît notre pays.
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Monsieur le Président, la secrétaire parlementaire pourrait-elle nous dire pourquoi la politique a été adoptée en 2007? Environnement Canada existait depuis 1970. Jamais, entre 1970 et 2007, un gouvernement n’a jugé qu’il était nécessaire que les médias, des représentants et des journalistes passent par un processus inquisitorial pour avoir accès à nos scientifiques. Ils pourraient prendre le téléphone ou envoyer un courriel et obtenir une entrevue avec des scientifiques et des chercheurs de tout le Canada.
Qu’est-ce qui peut justifier la mise en place d’un tel processus qui oblige souvent nos journalistes à s’adresser à des scientifiques d’autres pays pour obtenir des réponses au sujet du travail qui se fait au Canada?
Mme Michelle Rempel: Je le répète, monsieur le Président, il faut s’arrêter aux faits. Depuis janvier dernier, 1 000 entrevues ont été accordées par des fonctionnaires d’Environnement Canada, et plus de 600, par des scientifiques du ministère. Cela montre que nous communiquons avec la population canadienne, puisque c’est notre rôle, mais nous obtenons aussi des résultats tangibles, de qualité et axés sur l’action dans le domaine de la protection de l’environnement au Canada, ce dont le gouvernement est très fier.