Loi sur la réforme de la non-responsabilité criminelle (le projet de loi C-54)

Elizabeth May : Monsieur le Président, je suis déçue que l’opposition officielle appuie ce projet de loi tel quel.

Je l’ai lu attentivement, je l’ai étudié et je ne suis toujours pas convaincue qu’il établit un juste équilibre dans son approche de la problématique de la non-responsabilité criminelle. Il n’y a actuellement pas la moindre preuve empirique que le système ne fonctionne pas bien pour les Canadiens.

J’appuie vigoureusement les dispositions qui permettent aux victimes d’être avisées à l’avance. Je pense néanmoins que nous aurions pu mieux tenir compte des intérêts et des droits des victimes. D’autre part, il n’était pas nécessaire d’inclure, par exemple, la notion de « nature brutale ». Cela pourrait maintenant changer complètement la donne pour l’accusé à haut risque. Si le crime commis entre dans la catégorie des actes de nature brutale, même s’il ne provoque pas la mort ou la perpétration d’un autre crime grave, la brutalité de l’infraction est citée dans la loi comme raison suffisante pour placer quelqu’un dans la catégorie des accusés à haut risque.

Or, la notion de « nature brutale » n’a aucune définition en droit pénal pas plus qu’elle n’est définie dans le domaine de la santé mentale ou dans les milieux universitaire et scientifique. Par conséquent, elle crée énormément d’incertitude pour les gens qui pourraient être classés dans la catégorie des accusés à haut risque.

J’invite mon collègue à nous parler de cette faiblesse du projet de loi.

Randall Garrison : Monsieur le Président, je suis perplexe quand j’entends la députée dire qu’il n’y a aucune preuve empirique montrant qu’il faut faire quelque chose ou aller de l’avant avec ce projet de loi. N’a-t-elle pas entendu la voix des victimes? N’a-t-elle pas vu ce qui est arrivé à des victimes un peu partout dans notre pays? Je crois qu’il y a en fait une abondance de preuves empiriques.

Je le dis encore une fois: ce projet de loi aiderait en fait à atténuer la stigmatisation des personnes souffrant de problèmes de santé mentale en mettant dans une catégorie à part les très rares délinquants à haut risque qui ont commis ce que je qualifierais d’actes très brutaux. Il n’y a pas moyen de décrire une décapitation publique autrement qu’en utilisant le mot « brutal ». Cela aiderait aussi à convaincre le public que nous avons mis en place les mesures voulues pour nous occuper de ces cas, de manière à pouvoir ensuite consacrer notre attention aux autres problèmes de santé mentale dans la société sans avoir à nous inquiéter de ces cas extrêmes.