Elizabeth May : Monsieur le Président, comme nous discutons actuellement d’attribution de temps en réponse à la motion que le ministre de la Justice et le leader du gouvernement à la Chambre des communes ont présentée, j’aimerais de nouveau aborder la question du préjudice et du manque de respect, voire du mépris, à l’égard de la Chambre et du rôle des députés que constituent les 78 motions d’attribution de temps auxquelles nous avons eu droit au cours de la présente législature.
Je sais que vous, monsieur le Président, examinez soigneusement la motion que j’ai présentée, c’est-à-dire la question de privilège que j’ai présentée le 15 septembre, ainsi que les nombreux avis juridiques qui donnent à penser que notre capacité d’exécuter notre travail, qui est une question de privilège, et de demander des comptes au gouvernement, est sérieusement menacée, voire compromise, par le recours constant à l’attribution de temps.
J’ai mentionné la décision du juge Binnie et la décision Vaid rendue en 2005 selon lesquelles l’essence même de notre travail en tant que députés est de demander des comptes au gouvernement. Pour arriver à faire ce travail, il nous faut suffisamment de temps pour les débats.
Je crois comprendre que le ministre de la Justice est d’avis que nous avons amplement de temps pour les débats. Toutefois, en réalité, de nombreux commissaires à la protection de la vie privée de ce pays croient que le projet de loi enfreint le droit à la vie privée. Des avocats et des experts de l’Association du Barreau canadien jugent qu’il ne résistera pas à une contestation devant la Cour suprême, mais on nous demande d’en précipiter l’adoption.
Il s’agit d’une violation de nos droits. Je demande au ministre de la Justice de reconsidérer sa position. Nous avons fréquenté la même faculté de droit. J’ose croire que nous avons autre chose en commun, c’est-à-dire le respect à l’égard du Parlement.
L’hon. Peter MacKay : Monsieur le Président, je siège dans cette enceinte depuis un bon moment déjà, soit depuis 1997, et j’ai déjà été assis à la même place que la députée, littéralement.
Nous avons entendu certains propos exagérés, notamment que nous compromettons la démocratie et que nous étouffons le débat. Comme je l’ai déjà mentionné, nous avons déjà longuement débattu du projet de loi. Il a été étudié par le comité. Les procureurs généraux et les ministres de la Justice des provinces et des territoires ont formulé des observations. Nous avons reçu les commentaires d’avocats et de spécialistes reconnus dans le domaine de la cybercriminalité, de l’utilisation d’Internet et de l’utilisation des technologies modernes d’information.
Le moment est venu d’aller de l’avant. Le moment est venu de marquer des progrès réels en ce qui concerne cette mesure législative et de modifier le Code criminel pour être en mesure de protéger les gens contre ce fléau qu’est la cybercriminalité. C’est de cela qu’il s’agit.
Nous pouvons certes invoquer les règles de procédure de la Chambre des communes, mais il faut se rendre à l’évidence, et je crois que ma collègue de Saanich—Gulf Islands sera d’accord avec moi, comme avocate et comme personne ayant des connaissances juridiques: il est nécessaire et urgent de moderniser le Code criminel et de proposer des modifications qui donneront aux enquêteurs, aux tribunaux et à l’ensemble de l’appareil judiciaire le pouvoir d’améliorer un système qui est dépassé et qui, manifestement, n’offre pas les mesures de protection nécessaires contre la cybercriminalité.
Ces articles du Code criminel ont été élaborés avant l’avènement d’Internet. Nous en avons déjà parlé, mais je tiens à le répéter: le projet de loi ne donne pas de nouveaux pouvoirs aux policiers. Il ne leur donne pas de nouveaux pouvoirs d’enquête sans surveillance judiciaire. C’est une possibilité que nous avons réellement étudiée lors de l’élaboration et de la présentation du projet de loi. Nous l’avons aussi réellement étudiée dans la foulée de l’arrêt Spencer qui, puis-je le rappeler aux députés, est lié à une affaire de possession et de distribution de pornographie juvénile.
Revenons à la réalité. Revenons à l’importance d’établir des lois et de proposer des modifications au Code criminel qui permettront de protéger les citoyens canadiens et de protéger notre capacité de mener des enquêtes sur Internet, un travail important qui nous aidera à éviter que de terribles tragédies, comme le décès de Rehtaeh Parsons, se produisent.