Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands)
2021-04-15 15:49 [p.5690]
Monsieur le Président, c’est un honneur de rendre hommage aujourd’hui à un être humain remarquable, un membre de la famille royale et une personne qui aimait profondément le Canada, ses paysages naturels et sa faune.
Lors d’une chaude journée de juin, en 1987, je me promenais dans le champ d’un agriculteur, en Saskatchewan, quand j’ai eu l’immense honneur de rencontrer Son Altesse Royale le prince Philip, duc d’Édimbourg. Il était en train de faire ce que je crois qu’il aimait le plus, c’est-à-dire accroître la sensibilisation et l’appui de la population envers les espèces en péril.
Nous étions dans le champ d’un agriculteur. Je me souviens qu’il se nommait Grant Fahlman. C’était l’un des premiers agriculteurs en Saskatchewan à participer à l’opération Chouette des terriers visant à assurer la préservation de cet oiseau très menacé, dont la situation est malheureusement encore plus précaire de nos jours.
Son Altesse Royale le duc d’Édimbourg s’était rendu là-bas dans le cadre de son travail pour le Fonds mondial pour la nature, dans lequel il était très impliqué, comme vient de le dire le député de Cowichan—Malahat—Langford. Il était là pour accroître la sensibilisation et l’appui de la population à cette cause. Sa tournée en Saskatchewan, en juin 1987, incluait une halte à la ferme familiale de Grant Fahlman, ainsi qu’une visite du lac de la Dernière-Montagne pour voir les grues blanches et les grues du Canada, deux espèces en voie de disparition.
Cependant, ce qui me frappe le plus lorsque je repense à ce voyage, c’est l’extraordinaire intérêt de Son Altesse Royale pour les détails. Il était très vigilant et rien ne lui échappait. Je vais donner deux brefs exemples. Nous marchions dans un champ lorsqu’il a repéré un morceau d’excrément desséché. Il s’est alors baissé pour le ramasser et l’examiner. Il l’a remis à un biologiste de la faune qui nous accompagnait et lui a demandé: « Que pensez-vous que ce soit? De quel animal pensez-vous que cela vienne? »
Le biologiste a répondu: « Je ne sais pas. C’est peut-être un coyote ». Il a ensuite jeté le morceau d’excrément avec désinvolture. Son Altesse Royale a dit: « Excusez-moi, vous allez le jeter bien que vous ne sachiez pas ce que c’est? Nous devrions sûrement nous renseigner ». Le biologiste s’est dépêché à retrouver le morceau d’excrément desséché, l’a emporté avec lui et a promis à Son Altesse Royale de l’étudier. Rien n’échappait à son attention.
J’étais là en ma qualité de conseillère politique du ministre fédéral de l’Environnement de l’époque, et la chevêche des terriers s’est soulagée dans les mains du ministre. J’ai pris une serviette en papier dans ma sacoche et je lui ai tendue très discrètement pour qu’il puisse s’essuyer. Un peu plus tard dans la journée, ce fut mon tour d’être présentée. Tom McMillan, mon patron, s’est tourné vers Son Altesse Royale et il a dit: « Je veux vous présenter un membre de mon personnel, elle… », et Son Altesse Royale l’a interrompu en disant: « Oh, je sais, elle vous glisse des Kleenex ». Il avait tout vu. Il avait une vue très perçante et il était très attentif aux détails.
Sa visite visait aussi à recueillir des fonds pour Canards Illimités en vue de protéger les sauvagines migratrices, les terres humides et la région des fondrières des Prairies. Il était là en sa qualité de président du Fonds mondial pour la nature, un rôle qu’il a occupé de 1981 à 1996. Il était très engagé. Il a également été vice-président de l’Union internationale pour la conservation de la nature de 1981 à 1988.
Le dévouement de Son Altesse Royale le prince Philip, duc d’Édimbourg, n’était pas une simple façade. Il ne se contentait pas de participer à une activité ici et là. Il est allé défendre la protection de la faune et la préservation des éléments au cœur des écosystèmes dans une cinquantaine de pays. Il a contribué à sauver les forêts anciennes du Canada en participant à la campagne qui a été menée à l’époque dans le but de protéger ce qui est aujourd’hui la réserve de parc national Gwaii Haanas, à Haida Gwaii.
Le député de Cowichan—Malahat—Langford a souligné le fait que le prince Philip était aussi connu pour ses faux pas occasionnels, mais je crois que les habitants, la faune et la flore et les écosystèmes menacés de toute la planète sont immensément redevables à ce membre de la famille royale, dont le sens du devoir était exemplaire. Son inspiration et son amour de la nature étaient sans pareils.
Je joins ma voix à celle de tous mes collègues pour transmettre aujourd’hui les plus sincères condoléances du peuple canadien à Sa Majesté la reine Elizabeth II. Il s’agit d’une perte incommensurable pour elle et pour toute la famille royale. Personnellement, je suis reconnaissante d’avoir eu l’insigne honneur de pouvoir rencontrer une personne qui avait autant à cœur la faune, la flore et les grands espaces sauvages du Canada.