Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands)
2020-12-03 19:22 [p.2955]
Madame la Présidente, j’aimerais profiter du débat sur la motion d’ajournement de ce soir pour revenir sur une question que j’ai posée le 20 novembre, mais à laquelle je n’ai pas eu de réponse satisfaisante.
Ma question portait sur une mesure législative dont la Chambre a été saisie dernièrement, le projet de loi C-12, qui porte le titre pompeux de « loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité ». Or, il s’agit d’un échec à quasiment tous les égards. Le Parti vert ne sait même pas quoi en faire. Nous sommes évidemment favorables à la responsabilité en matière de carboneutralité, mais nous nous demandons si nous pourrons voter pour ce projet de loi à l’étape de la deuxième lecture afin qu’il soit renvoyé à un comité.
Voici ce qu’une loi doit minimalement faire pour pouvoir prétendre favoriser la responsabilité en matière de carboneutralité: elle doit tenir compte de la science, elle doit préconiser un processus adéquat et elle doit exiger des comptes pour vrai. Or, pour le moment, tout ce qu’on peut dire au sujet du projet de loi C-12, c’est: « Trois prises; retiré! »
Commençons par l’aspect scientifique. Le préambule ne doit pas prendre appui sur l’un des préceptes du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat — celui selon lequel la planète devra être carboneutre d’ici 2050 si on veut que le réchauffement de la planète ne dépasse pas 1,5 degré Celsius — si c’est pour ensuite faire comme si la situation n’était pas déjà urgente et qu’il ne fallait pas agir dès aujourd’hui. Le GIEC estime en outre que, si nous voulons avoir le moindre espoir de maintenir le réchauffement sous la barre du 1,5 degré, les émissions de gaz à effet de serre devront diminuer de manière extrêmement marquée d’ici 10 ans.
Il ne s’agit pas de répartir les efforts uniformément sur 30 ans afin que nous puissions prendre notre temps et en faire un peu tous les 10 ans. Non, nous ne pouvons pas procéder ainsi. Il faut que le plus gros du travail soit fait d’ici 2030. Or, ce n’est pas indiqué clairement dans le projet de loi. En fait, la façon dont le projet de loi est structuré ne permet pas de le faire, puisque 2030 est la première année jalon.
Il faut ensuite établir un bon processus. En toute franchise, je suis stupéfaite que le gouvernement libéral semble avoir fait fi de l’expérience acquise dans d’autres pays lorsqu’il s’agit d’adopter des mesures législatives en matière de reddition de comptes. La loi du Royaume-Uni est en place depuis 2008. Nous pouvons tirer des leçons de l’expérience du Royaume-Uni, tout comme l’ont fait la Nouvelle-Zélande et le Danemark en mettant en place leur propre loi. Dans tous les pays où ce type de loi fonctionne, on s’est appuyé sur l’avis d’experts. Lorsqu’ils ont un groupe consultatif, ce groupe est composé d’experts.
Ce projet de loi prévoit la mise sur pied d’un organisme consultatif qui semble être une version d’un groupe multilatéral non composé d’experts. C’est une erreur de taille. Comprenez-moi bien, je suis favorable aux groupes multilatéraux. J’ai moi-même été vice-présidente de la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie, qui a été dissoute et abolie. Au départ, elle avait été créée par le gouvernement Mulroney, soit dit en passant, et elle a été abolie en vertu du projet de loi C-38 au printemps de 2012. Nous devrions créer une autre table ronde nationale ou une quelconque entité de cette nature, mais pas de façon déguisée avec le projet de loi C-12, parce que nous avons besoin de conseils d’experts, pas de conseils de divers intéressés.
Le troisième domaine de responsabilisation ne prévoit pas de mécanismes pour demander des comptes au gouvernement et le mettre sur le droit chemin. Ce projet de loi ne parle pas d’obligations pour le ministre d’atteindre les cibles. C’est curieux. J’ai discuté avec des homologues de la Nouvelle-Zélande et ils envisagent d’inclure de tels énoncés disant, par exemple, que si la cible n’est pas atteinte, le gouvernement devra compenser en achetant des crédits et en assumant les coûts. Leur ministère des Finances est prêt à prévoir les coûts s’il n’atteint pas les cibles. Par conséquent, il y a bel et bien une pénalité financière et le gouvernement veillera à maintenir le cap pour éviter d’avoir à payer.
Le plus important, c’est que sous la gouverne du président élu Biden, les États-Unis, vont appuyer l’Accord de Paris, et ils ont nommé un envoyé spécial de haut calibre, John Kerry. Le Canada devrait saisir la balle au bond et faire preuve d’audace.
Ce projet de loi n’est pas suffisant. J’espère que des amendements seront apportés avant l’étape de la troisième lecture et celle du rapport.
Paul Lefebvre (Sudbury)
2020-12-03 19:26 [p.2955]
Madame la Présidente, la priorité immédiate du gouvernement consiste à soutenir les Canadiens durant la pandémie. Cela dit, nous planifions également stratégiquement des moyens de favoriser la prospérité économique tout en luttant contre les changements climatiques, qui représentent une crise mondiale.
Les Canadiens ressentent les effets des changements climatiques, et le gouvernement comprend l’urgence d’intervenir et d’intégrer la durabilité dans tous les aspects de notre économie. C’est essentiel pour les Canadiens d’aujourd’hui et de demain.
Nous faisons des progrès. Le plan actuel du Canada en matière de lutte contre les changements climatiques, le cadre pancanadien, devrait permettre une réduction historique des émissions. Cela dit, nous savons que nous devons faire plus. Voilà pourquoi le gouvernement s’engage à surpasser les cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre qu’il s’était fixées pour 2030 ainsi qu’à placer le Canada sur la voie de la prospérité dans une économie carboneutre d’ici 2050.
Nous nous sommes également engagés à présenter, avant la COP26, qui aura lieu en novembre 2021, une nouvelle cible de réduction des émissions pour 2030 à titre de contribution déterminée au niveau national.
Pour atteindre ces cibles, nous renforçons les mesures existantes visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et en instaurons de nouvelles, lesquelles ont été annoncées dans l’énoncé économique de l’automne 2020. Nos efforts en vue de rebâtir en mieux rendront l’économie plus verte, plus inclusive, plus résiliente et plus concurrentielle.
Nos investissements permettront entre autres de placer la lutte contre les changements climatiques au cœur de notre plan visant à créer un million d’emplois, de renforcer le soutien à la formation pour les personnes touchées le plus durement par la pandémie, notamment les femmes marginalisées et racialisées, les Autochtones, les personnes en situation de handicap et les néo-Canadiens, et de fournir jusqu’à 700 000 subventions aux propriétaires d’habitation pour les aider à améliorer l’efficacité énergétique de leur domicile.
Nous nous sommes engagés à investir dans l’approvisionnement en énergie propre au Canada et à développer un réseau d’électricité propre pour rejoindre l’ensemble des Canadiens. Nous investissons dans les véhicules zéro émission, y compris dans le déploiement d’une infrastructure de recharge et de ravitaillement. Le gouvernement du Canada vise aussi à créer un marché du financement durable qui fonctionnera bien au pays. Nous accordons également la priorité aux investissements dans des solutions naturelles, y compris la plantation de deux milliards d’arbres sur 10 ans.
Nous investissons dans des solutions naturelles et respectueuses du climat pour réduire les émissions de gaz à effet de serre liées à la perte des écosystèmes, et nous nous sommes engagés à verser des fonds supplémentaires pour soutenir les solutions climatiques pour l’agriculture. Dans les semaines à venir, le gouvernement présentera ces mesures et d’autres éléments dans un plan cohérent et amélioré pour lutter contre les changements climatiques. Les Canadiens seront ainsi informés en toute transparence de la façon avec laquelle le Canada dépassera ses cibles fixées pour 2030 dans l’Accord de Paris.
Après la présentation du plan, nous consulterons nos partenaires, les peuples autochtones, les provinces, les territoires, les municipalités, le secteur industriel et la société civile. Ces consultations permettront d’établir les nouvelles cibles du Canada pour 2030.
Je tiens à remercier la députée de son engagement envers l’accentuation de la lutte contre les changements climatiques. Je me réjouis à l’idée de travailler avec elle, nos collègues et l’ensemble des Canadiens alors que nous élaborons un plan qui permettra au Canada de dépasser ses cibles pour 2030 et de s’engager sur la voie d’un avenir carboneutre prospère.
Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands)
2020-12-03 19:29 [p.2956]
Madame la Présidente, quand le député parle des objectifs de l’Accord de Paris, il donne ceux de Stephen Harper après qu’il les a révisés à la baisse pour la troisième fois. Il s’agit des objectifs les moins ambitieux parmi les trois de Stephen Harper, et ce sont encore eux que nous tentons d’atteindre cinq ans après les élections. Selon moi, c’est non seulement déconcertant, c’est tragique.
À Paris, dans le document sur la décision de la Conférence des Parties, le gouvernement du Canada s’est engagé à revoir à la hausse ses cibles de 2030 cette année, en 2020, et non seulement avant la COP26 de l’année prochaine, mais bien cette année, alors qu’il reste très peu de jours pour respecter nos obligations internationales.
Il reste très peu de temps. La fenêtre pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré se refermera dans les prochaines années, bien avant 2030. Si elle se referme, elle le fera pour de bon, ce qui empêchera nos enfants d’avoir un monde habitable. Les enjeux ne pourraient être plus élevés. Le gouvernement doit faire mieux.
Paul Lefebvre (Sudbury)
2020-12-03 19:30 [p.2956]
Madame la Présidente, selon les experts scientifiques, pour éviter les pires répercussions des changements climatiques, il faut diminuer les émissions mondiales de gaz à effet de serre rapidement au cours des trois prochaines décennies.
L’Accord de Paris demande aux gouvernements du monde entier de prendre des mesures urgentes et ambitieuses de lutte contre les changements climatiques afin de maintenir le réchauffement planétaire bien en dessous de deux degrés et de poursuivre les efforts visant à le limiter à 1,5 degré en vue d’éviter les pires répercussions des changements climatiques.
En 2018, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a publié un rapport spécial sur le réchauffement planétaire de 1,5 degré. Dans ce rapport, on conclut que les émissions mondiales doivent atteindre la limite nette zéro pour qu’il y ait une probabilité raisonnable d’atteindre l’objectif consistant à limiter le réchauffement à 1,5 degré.
Le 19 novembre 2020, le ministre a déposé le projet de loi C-12, la Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité qui, s’il est adopté, obligerait le gouvernement à suivre un processus visant à atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Le projet de loi rendrait exécutoire la cible de 2030 et établirait cinq années cibles de réduction des émissions jusqu’à 2050, afin d’améliorer la reddition de comptes et la transparence. Nous sommes impatients de travailler avec tous les partis afin de faire adopter cet important projet de loi et de raffermir les cibles de 2030.