Loi visant la protection des mers et ciel canadiens (Projet de loi C-3)

Elizabeth May : Monsieur le Président, puisque nous ne savons pas grand-chose sur la teneur des matières dangereuses qu’on appelle couramment des diluants, j’ai effectué quelques recherches. La ministre nous affirme dans son discours qu’il est possible d’acheminer du pétrole en toute sûreté par superpétrolier, mais aucune des propositions actuelles d’exportation de combustibles fossiles canadiens ne traite expressément du transport du pétrole. Plutôt, il y est toujours question du transport d’un produit appelé bitume, une substance non fluidifiable qu’il faut mélanger à ce qu’on appelle un diluant.

Prenons l’exemple de la proposition d’Enbridge, le projet Northern Gateway. Des superpétroliers remplis de diluant acheté au Moyen-Orient arriveraient sur les rives de la Colombie-Britannique. Le diluant serait déchargé à Kitimat, puis acheminé par pipelines jumelés jusque dans le Nord de l’Alberta pour être incorporé à du bitume. Ce dernier ne serait donc pas transformé et raffiné en Alberta même: on le mélangerait au diluant, qui n’est en fait qu’un distillat du pétrole appelé naphta mélangé à du benzène et, selon ce que j’ai aussi découvert, à du butane. En fait, nous ne savons pas exactement quelle est la composition chimique du diluant, car c’est essentiellement une appellation commerciale. C’est un nom commun qui n’a aucune signification sur le plan scientifique. Or, ce produit est bel et bien toxique. Ça irait dans les deux directions. Si nous devions laisser ce projet monstrueux aller de l’avant, le diluant arriverait chez nous par bateau, serait mélangé au bitume, puis repartirait par pipeline. Comme en témoigne la tragédie de Lac-Mégantic, qui impliquait du pétrole brut de la formation de Bakken, nous n’avons pas la moindre idée de ce que transportent les pipelines et les wagons.

Mon ami a-t-il l’impression que nous savons vraiment ce qui circule dans les pipelines?

David McGuinty : Monsieur le Président, ce bitume dilué et ses effets sur les pipelines suscitent manifestement la discussion. Le débat fait rage quand il est question des pipelines existants, par exemple de la ligne 9.

De nombreux résidants de ma circonscription, Ottawa-Sud, vivent tout près de l’endroit où le sens de l’écoulement de la ligne 9, entre Sarnia et Montréal, est inversé. Ils se demandent très sérieusement si un pipeline de 35 ou 36 ans peut résister à la toxicité à laquelle la députée a fait allusion au sujet du nouveau produit qui va y circuler. La société de pipeline nous assure que les analyses scientifiques sont terminées à cet égard. Je ne suis pas un homme de science, mais s’il y a une chose que je sais à propos des données scientifiques, c’est qu’elles ne sont jamais complètes.

L’étude au comité nous donnera l’occasion d’en apprendre plus de la bouche d’experts afin de déterminer si nous connaissons bien le genre de diluant utilisé, ses éventuels effets toxiques, son degré d’acidité et l’effet corrosif qu’il aura sur les pipelines et si nous comprenons ce qui se passera s’il survient un déversement. En tant que législateurs responsables, il est de notre devoir de poser de nombreuses questions importantes. Le gouvernement est majoritaire au comité. Il lui incombe donc de s’assurer que les experts compétents seront convoqués afin que nous puissions entendre les témoignages dont nous avons besoin.