Elizabeth May : Monsieur le Président, j’interviens dans le cadre de ce débat d’ajournement pour donner suite à une question que j’ai posée le 19 juin, avant que la Chambre ajourne pour l’été. Cette question me permet de revenir sur un sujet d’importance fondamentale pour mes électeurs, et je m’en réjouis.
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Deux fois par année, j’organise neuf assemblées publiques dans ma circonscription. À la dernière série d’assemblées, les électeurs se sont dits surtout préoccupés par la menace que posent les superpétroliers remplis de bitume et de diluant, le pipeline double entre le Nord de l’Alberta et Kitimat, ainsi que l’autre projet, celui qui consiste à allonger les pipelines jusqu’à Vancouver, pour qu’une quantité encore plus grande de bitume et de diluant sorte du port de Vancouver.
Toujours est-il que le 19 juin, j’ai demandé au premier ministre s’il était prêt à nous imposer de force le projet Enbridge si la province de la Colombie-Britannique continuait de s’y opposer.
L’opposition au projet Enbridge fuse de toutes parts. Le pipeline double, qui transportera entre Kitimat et l’Alberta un condensat de combustible fossile toxique appelé diluant, qui arrivera à destination sous forme d’un solide appelé bitume, de même que les deux groupes de superpétroliers, l’un qui amènera du diluant et l’autre qui collectera du diluant mélangé à du bitume avant de quitter pour l’étranger — tout ce projet pose un risque inacceptable pour la Colombie-Britannique.
Lorsque je dis qu’une foule de gens s’opposent à ces projets, je ne veux pas nécessairement dire qu’il y a des manifestations. Nous parlons ici de la Colombie-Britannique elle-même. Immédiatement après avoir pris connaissance de la décision de l’Office national de l’énergie et appris que le Cabinet avait approuvé le projet, la ministre de l’Environnement, Mary Polak, a dit qu’il n’était pas question que ce projet se concrétise, étant donné que les conditions posées par la province n’étaient toujours pas respectées.
Cela dit, d’autres groupes s’opposent au projet, comme l’Union des municipalités de la Colombie-Britannique, les Premières Nations et, bien entendu, la majorité des habitants de la Colombie-Britannique.
Lorsque j’ai demandé si on avait l’intention de nous faire avaler le projet de force, je pensais précisément au premier ministre. En 2001, il a signé une lettre plutôt célèbre, qu’on appelle généralement la lettre du pare-feu albertain. À cette époque, le premier ministre était président de la National Citizens Coalition, et il était le premier à signer la lettre, suivi par Tom Flanagan et d’autres Albertains.
Voici ce qu’ils ont écrit au premier ministre Klein:
Il est impératif de prendre l’initiative, d’édifier des pare-feu autour de l’Alberta et d’empêcher un gouvernement fédéral agressif et hostile de trop empiéter sur des prérogatives provinciales légitimes.
C’était là l’essence de la question que j’ai posée. La secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, qui avait répondu à ma question à ce moment, avait évité de parler des compétences fédérales-provinciales et des conflits qui y sont associés, alors qu’il s’agit d’un enjeu fondamental. De nombreux Britanno-Colombiens veulent que le premier ministre et son Cabinet nous disent jusqu’où ils sont prêts à aller pour imposer un projet que les Britanno-Colombiens ont rejeté.
Depuis que j’ai posé cette question, il y a eu des développements importants. En effet, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans l’affaire de la nation Tsilhqot’in. Je suis probablement la première députée à parler de cette décision en ce dernier jour de septembre, car elle a été rendue cet été. C’est une décision extraordinaire. Elle indique clairement que les titres ancestraux des Premières Nations sont précisément ce que leur nom indique: des titres. Il n’est pas uniquement question ici de consulter les Premières Nations, mais bien de leur donner le droit de dire qu’elles n’accepteront pas que leur territoire soit détruit.
Compte tenu des circonstances, quand le gouvernement admettra-t-il que le projet Enbridge, qu’il a approuvé, ne se concrétisera jamais?
Eve Adams : Monsieur le Président, notre décision est fondée sur les conclusions d’une commission d’examen scientifique indépendante. Après avoir étudié attentivement le rapport de l’organisme de réglementation indépendant sur le projet Northern Gateway, le gouvernement a accepté la recommandation d’imposer 209 conditions afin de s’assurer que le projet respecte les normes de sécurité les plus élevées. La commission d’examen a entendu près de 1 500 participants dans 21 collectivités et étudié plus de 175 000 pages de preuve documentaire avant de formuler cette recommandation.
Nous en sommes maintenant à une autre étape du processus. Il incombera maintenant au promoteur de montrer à l’organisme de réglementation et aux Canadiens comment il répondra à plus de 200 conditions. Il devra aussi demander des autorisations et des permis réglementaires aux gouvernements fédéral et provinciaux, ainsi qu’aux administrations municipales.
Finalement, pour obtenir ces autorisations et permis réglementaires, le promoteur doit se soumettre aux nombreuses conditions qui exigent qu’il mène des consultations auprès des Premières Nations. Il doit également remplir son engagement de dialoguer avec les Premières Nations et les populations établies le long du tracé.
Il est clair que le promoteur a beaucoup de travail à faire. Le gouvernement a promis aux Canadiens que les projets iront de l’avant seulement s’ils ne présentent aucun danger pour la population et l’environnement. C’est là le principe directeur de notre plan de développement responsable des ressources.
Nous avons instauré une série de mesures pour accroître la sécurité des pipelines et la sécurité maritime. Que nous transportions l’énergie par train, par pétrolier ou par pipeline, nos systèmes de sécurité sont de calibre mondial. Le bilan de sécurité des oléoducs sous réglementation fédérale est d’ailleurs de 99,999 %, et le gouvernement prend des mesures afin de l’améliorer encore davantage. Notre objectif global est de prévenir les incidents.
Dans l’éventualité peu probable d’un incident, nous devons avoir en place des plans d’intervention solides et transparents. À cela nous ajoutons des régimes de responsabilité accrue pour montrer à l’industrie que nous prenons très au sérieux la protection de l’environnement.
Nous reconnaissons également que les Autochtones doivent être nos partenaires à part entière dans tout ce que nous faisons, qu’il s’agisse de la sécurité de notre réseau de pipelines, de la protection de notre milieu marin contre les incidents ou du partage des avantages découlant du développement de nos ressources.
Dans son rapport, Douglas Eyford formule des recommandations pour améliorer les relations avec les Autochtones. Il dit:
Le Canada doit prendre des mesures décisives pour former des liens de confiance avec les Autochtones canadiens, favoriser leur inclusion au sein de l’économie et faire avancer la réconciliation des Autochtones et des non-Autochtones dans la société canadienne.
Le gouvernement est d’accord. Nous déployons une série de mesures pour permettre aux Autochtones de participer pleinement à l’élaboration et à l’exécution de nos projets d’infrastructure énergétique, y compris nos systèmes de sécurité pour les pipelines et les pétroliers.
Grâce à la participation des Premières Nations et à notre résolution à mettre en place des systèmes de sécurité de calibre mondial pour les pipelines, nous sommes convaincus que le Canada peut exploiter l’énorme potentiel économique qui se présente à lui. Nous pouvons diversifier les marchés dans le secteur de l’énergie et assurer la prospérité des Canadiens pour les générations à venir.