Lettre au Président demande un débat d’urgence sur la position du Canada cours de la CdP 17

L’honorable Andrew Scheer
Président
Chambre des communes
Ottawa (Ontario)
K1A 0A6

28 novembre 2011

Monsieur le Président,

Conformément à l’article permanent 52 (2), veuillez accepter cet énoncé écrit exprimant mon intention de proposer l’ajournement de la Chambre en vue d’un débat d’urgence. Conformément à l’article permanent 30 (3-4), je présenterai cette motion immédiatement une fois les affaires courantes de la présente journée achevées.

Je demande la tenue d’un débat d’urgence sur une question précise et importante nécessitant une considération immédiate. La question à débattre porte sur la position de négociation du Canada en vue de la 17e Conférence des Parties de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) qui aura lieu conjointement à la 6e Conférence des Parties au Protocole de Kyoto, à Durban, en Afrique du Sud (CdP17).

Je m’attends à ce que cette lettre soit trop longue pour que vous me permettiez de la présenter à la Chambre, puisque les énoncés des motifs expliquant l’ajournement en vue d’un débat d’urgence sont traditionnellement brefs. Je souhaiterais cependant vous fournir de l’information contextuelle sur la question urgente de la 17e CdP, d’une part, et sur les précédents issus de décisions présidentielles antérieures aux termes de la présente règle d’autre part.

Le Président Jerome a émis les remarques suivantes lorsqu’on a fait appel à lui pour autoriser la tenue d’un débat d’urgence; il s’agit d’une décision qui n’est pas facile à prendre étant donné la convention selon laquelle aucun débat ne peut avoir lieu.

« […] Il m’est arrivé d’annuler des motions aux motifs que la question concernait un problème persistant et non de nature urgente. En prenant une position très restrictive relativement au mot « urgence» énoncé dans ce sous-alinéa, je pourrais certainement nuire très facilement à l’application de l’ensemble des aspects régis par la règle […] ».

« Bien entendu, les dispositions de la règle font en sorte que je ne puisse entendre aucun argument. […] Il me semble que le rôle de président soit plutôt injuste. Prendre une position trop restrictive, comme je l’ai déjà mentionné, signifierait qu’il serait presque impossible de retirer les avantages de la règle et d’amener la Chambre à discuter d’une question importante qui exige une considération immédiate, même s’il ne s’agit pas nécessairement d’une urgence ou d’une crise comme les mots le supposent ». (Débats, 22 février 1978, p.3128)

À la fin de ses délibérations, le Président Jerome a octroyé le « bénéfice du doute » à la requête et a autorisé l’ajournement et la tenue d’un débat d’urgence.

La question qui nous occupe en constitue une de nature urgente sous plusieurs points de vue.

En premier lieu, la menace liée aux changements climatiques d’origine humaine constitue un danger immédiat. Les dommages associés aux changements climatiques coûtent déjà des milliards de dollars au Canada, causant des décès et des dégâts à l’échelle planétaire et, comme la présente lettre le décrira en détail plus loin, cette menace ne peut être efficacement contrôlée qu’en adoptant des mesures dans le cadre de la 17e CdP.

En deuxième lieu, la question précise de la position de négociation du Canada lors de la 17e CdP est des plus urgentes. La 17e CdP a débuté plus tôt aujourd’hui et se conclura le 9 décembre. Les membres n’ont pas eu la possibilité de discuter de la position de négociation du Canada. Le Comité permanent de l’environnement et du développement durable a entrepris un examen législatif obligatoire de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Aucune discussion sur la 17e CdP n’a eu lieu. Il n’y a eu aucune possibilité de débattre à la Chambre de la 17e CdP.

Normalement, selon la pratique établie depuis des décennies, les députés des partis d’opposition devraient prendre part à la 17e CdP en tant que membres de la délégation du gouvernement du Canada. Cependant, comme le ministre de l’Environnement en a avisé la Chambre (le 14 novembre 2011 durant la période de questions), les députés de l’opposition ne feront pas partie de la délégation canadienne durant la 17e CdP. Chaque parti d’opposition à la Chambre a écrit au premier ministre pour exiger qu’un de ses membres prenne part à la délégation, sans que le gouvernement du Canada n’ait à en assumer le coût. Les lettres des porte-parole en matière d’environnement de l’Opposition officielle, du Parti libéral et de moi-même sont annexées à la présente lettre. Le porte-parole en matière d’environnement du Bloc Québécois a envoyé une lettre semblable. Nous n’avons pas obtenu de réponse. Le fait que la 17e CdP ait débuté aujourd’hui nous force à accepter le fait qu’aucun de nous ne fera partie de la délégation canadienne, ni n’aura l’occasion de discuter et de débattre de la position du Canada sur la délégation de Durban.

Durant la période de questions du jeudi 24 novembre 2011, j’ai demandé à l’honorable leader du gouvernement à la Chambre si, devant la situation que j’ai créée, il planifiait tenir un débat sur le problème des changements climatiques à la Chambre avant le départ de l’honorable ministre de l’Environnement pour Durban. L’honorable leader du gouvernement à la Chambre a répondu qu’il ne prévoyait pas tenir de débat.

Ainsi, après avoir exploré d’autres avenues sans succès, j’en arrive à la conclusion inattaquable que sans la tenue d’un débat d’urgence, les députés n’auront pas l’occasion de discuter du rôle que le Canada jouera au cours de négociations cruciales.

Pour évaluer adéquatement l’urgence de la situation que je vous ai présentée, M. le Président, il est nécessaire de jeter un œil aux conseils fournis par d’éminents scientifiques canadiens, par ceux de tous les instituts scientifiques étrangers, de même que par le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat, l’organisme des Nations Unies mis sur pied afin d’examiner les données scientifiques et de conseiller les décideurs.

En juin 1988, le Canada a accueilli la première conférence scientifique internationale sur le climat (les changements atmosphériques et leurs conséquences pour la sécurité de la planète en constituaient le thème). Les scientifiques se sont entendus pour faire la déclaration suivante : « L’humanité se livre sans frein à une expérience inconsciente qui touche l’ensemble du globe et dont les conséquences définitives ne le céderaient en rien sinon à une guerre nucléaire mondiale ».

Depuis ce temps, il y a 30 ans, le niveau de consensus s’est renforcé et les avertissements sont devenus de plus en plus impérieux. Les principes scientifiques de base n’ont jamais été remis en cause. Certains gaz que l’on retrouve dans l’atmosphère (dioxyde de carbone, méthane, vapeur d’eau) piègent la chaleur du soleil à surface de la planète. Ce qu’on appelle l’« effet de serre » a été d’une grande utilité pendant des millions d’années. C’est ce qui a permis à la vie de croître et à l’humanité de prospérer comme nulle autre espèce. Sans effet de serre, le climat de cette planète serait trop froid pour préserver la vie. La menace réside dans les activités menées par l’humanité depuis la révolution industrielle, plus particulièrement depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale lorsque l’utilisation des combustibles fossiles et la destruction du manteau forestier se sont accrues de manière exponentielle. La combustion de combustibles fossiles dégage du dioxyde de carbone, le gaz à effet de serre le plus important parmi tant d’autres. En mesurant directement les bulles d’air contenues dans les carottes de glace de l’Antarctique, nous savons maintenant que des concentrations équivalentes de dioxyde de carbone dans notre atmosphère sont 30 p. 100 plus élevées que celles que l’on a observées au cours des deux millions d’années précédentes, c’est-à-dire, passant d’une concentration maximale de 285 parties par million (ppm) à plus de 390 ppm aujourd’hui. La perte de forêts est responsable de près de 25 p. 100 des changements néfastes dans la chimie atmosphérique, puisque les arbres absorbent le dioxyde de carbone, ce qui permet de réduire son incidence en tant que gaz à effet de serre.

J’ai assisté au débat scientifique de juin 1988 et j’ai participé à son organisation à titre de conseillère principale en politiques du ministre de l’Environnement de l’époque, l’honorable Tom McMillan; le point de mire de ce débat n’était pas axé sur ces principes fondamentaux, il portait seulement sur la question de savoir si l’on ressentait déjà la déstabilisation du climat mondial prévue. Le regretté M. Ken Hare, l’un des plus éminents scientifiques du Canada, a été le premier à déclarer que les vagues de chaleur extrêmes et les autres phénomènes météorologiques violents étaient attribuables au changement climatique. D’autres insinuaient qu’il était trop tôt pour se prononcer. Les températures fluctuent. Des événements climatiques extrêmes surviennent. Les scientifiques du climat utilisent souvent le terme « d’agitation militante » pour désigner les indices hauts bas de ce que nous considérons comme une température normale. Pendant longtemps, la majeure partie du débat consistait à savoir si oui ou non le signal indiscutable de l’impact climatique causé par les humains « tranchait sur l’agitation relative au changement climatique ».

Les tableaux actuariels ont permis d’évaluer le risque à un incident « une fois tous les cent ans ». Au cours des dernières décennies, alors que l’on connaît de plus en plus d’événements qui devaient se produire « une fois tous les cent ans » surviennent au cours de la même décennie, le consensus général confirme que l’on croit très fortement que la fonte des glaces dans l’Arctique, le retrait rapide des glaciers, les sécheresses extrêmes, les inondations majeures, la fonte du pergélisol, et le réchauffement et l’élévation du niveau de la mer, entre autres, sont attribuables à l’interférence des humains dans le système climatique. Le signal s’élève nettement au-dessus de la simple agitation militante à l’heure actuelle.

On ne discute plus de la possibilité de perte de banquises ou de la retraite des glaciers dans le cadre des échanges scientifiques. Nous sommes confrontés aux conséquences du changement climatique en ce moment même.

Dans la presse quotidienne, on ne comprend pas que le fait de vivre dans des conditions instables sur le plan climatique signifie que les sociétés humaines peuvent à présent s’adapter à ces conditions et ignorer la hausse des concentrations de gaz à effet de serre. Ne vous méprenez pas : l’adaptation est essentielle. Nous ne pouvons plus éviter les événements climatiques dévastateurs qu’il s’agisse des ondes de tempêtes, de l’élévation du niveau des mers ou de pluies diluviennes. L’ensemble de nos infrastructures, la totalité de l’environnement bâti par la main de l’homme, a été construit en fonction d’un autre climat. Nos industries liées aux ressources – agriculture, foresterie et pêches – prospéraient dans un climat différent. Ce climat n’existe plus et, dans quelques décennies, nous ne pourrons plus jamais rétablir le climat d’autrefois. L’adaptation engendrera des coûts importants, mais il faut le faire, au Canada et dans le monde en développement.

Cette menace urgente, le danger évident et présent dont j’ai parlé un peu plus tôt, repose sur ce qu’on appelle un « réchauffement précipité de la planète ». Exprimé simplement, dans un avenir très proche, et selon les courbes de tendance actuelles, il est probable que l’humanité déclenche un cercle vicieux de réchauffement atmosphérique s’accélérant. Les scientifiques prévoient déjà qu’un dangereux changement climatique, c.-à-d., un réchauffement de plus de 2 degrés Celsius, entraînera des pertes considérables sur le plan de la biodiversité, soit une perte évaluée à environ 50 %. Il est difficile de prévoir où mènera ce « réchauffement effréné de la planète », bien qu’il soit facile de reconnaître que la capacité de la planète à soutenir la vie humaine et toute forme de vie sera gravement limitée. Il faut éviter cela à tout prix.

Qu’est-ce qui pourrait déclencher un réchauffement effréné de la planète? Le changement climatique causé par l’activité humaine entraîne des conditions qui elles-mêmes augmentent le réchauffement. Cette réaction est attribuable à ce qu’on appelle des « boucles de rétroaction positive ». Par exemple, le réchauffement planétaire entraîne la fonte du pergélisol, à la grandeur de l’Arctique. Le sol gelé était à l’origine une fondrière, un terrain marécageux, où l’on retrouvait beaucoup de méthane. Toutefois, le pergélisol confine le méthane et le conserve hors de l’atmosphère. Au fur du dégel et de l’affaissement des terres gelées, le méthane est libéré et vient accroître le réchauffement atmosphérique. De la même manière, les conditions plus sèches augmentent le nombre de feux de forêt. Lorsque les arbres se font ravager par les flammes, une quantité plus grande de dioxyde de carbone est dégagée; il s’agit du carbone qui avait été accumulé dans la fibre de l’arbre par la photosynthèse. Un autre exemple, le réchauffement des océans qui entraîne la fonte des glaces de l’Arctique. La glace en soi fait partie de la capacité réfrigérante de la terre. En raison de ce qu’on appelle l’effet albédo, les reflets de la glace blanche réfléchissent les rayons du soleil dans l’espace. À mesure que les glaces fondent, les eaux sombres des océans sont mises à découvert. Ces eaux sombres absorbent facilement les rayons du soleil et la chaleur, ce qui intensifie la fonte des glaces, pour ensuite mettre à découvert une plus grande étendue d’eaux sombres, qui absorberont plus de chaleur pour accélérer la fonte des glaces de l’Arctique. Par conséquent, le réchauffement s’accélère.

Pour éviter le réchauffement précipité de la planète, tous les pays participant à la CCNUCC, de même que les 191 signataires du Protocole de Kyoto, ont convenu qu’il fallait réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre pour éviter que la température mondiale moyenne ne connaisse une augmentation de deux degrés Celsius par rapport à la température mondiale moyenne à l’époque de la révolution industrielle. À l’heure actuelle, la température s’élève déjà de presque un degré Celsius au-dessus de ce niveau. Les personnes qui croient qu’une augmentation d’un ou deux degrés de la température moyenne de la Terre est banale devraient prendre note que la dernière période glaciaire s’est terminée à cause d’une augmentation de seulement quatre ou cinq degrés. Donc, deux degrés Celsius peuvent faire une énorme différence. De nombreux scientifiques croient que deux degrés Celsius représentent une augmentation bien trop importante. Les probabilités que l’on évite un réchauffement précipité de la planète qui se traduirait par une augmentation de deux degrés Celsius sont d’environ une sur deux.

C’est pour cette raison que, lors de la 16e Conférence des Parties (CP) à Cancún, on a convenu que les nations devaient envisager de prendre des mesures pour réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre afin que la température n’augmente pas de plus de 1,5 degré. Les États insulaires ont adopté le cri de ralliement suivant : « 1,5 pour rester en vie ».

Selon le meilleur avis scientifique, il est impératif que l’augmentation des émissions de gaz sur la planète cesse d’ici 2015 pour éviter que la température augmente de plus de deux degrés Celsius. En toute franchise, il faut également noter que certains scientifiques respectés croient qu’il est désormais inévitable que la température augmente de plus de deux degrés. Cependant, je crois que les gouvernements et les parlements responsables doivent accepter le consensus et ne jamais cesser d’espérer que les réductions des émissions de gaz d’aujourd’hui sauveront nos enfants et nos petits-enfants. À titre de mère, de grand-mère, de députée et de chef du Parti vert du Canada, je refuser d’arrêter d’espérer alors qu’il y a encore de l’espoir.

Ceci nous ramène au premier point des raisons invoquées pour organiser un débat d’urgence : il s’agit là d’un enjeu unique et d’une situation d’urgence d’intérêt national. Ce problème transcende un ministre ou un ministère. Il interfère sur tous les plans avec notre économie et notre sécurité en matière d’énergie. Il s’avère également prometteur, car en réponse aux exigences visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, il en découlera une nouvelle révolution économique basée sur de nouvelles sources d’énergie durable, et des collectivités plus saines et déterminées.

Récemment, en réponse au World Energy Outlook 2011 de l’Agence internationale de l’énergie, Christiana Figueres, la responsable du climat de l’ONU a déclaré que ce qu’on observait n’était pas une entente internationale sur l’environnement — ce qu’on observait n’était rien de moins que la plus importante révolution industrielle et énergétique jamais vue.

Si l’on accepte de maintenir un niveau d’émissions de gaz à effet de serre suffisamment bas afin que la température n’augmente pas de plus de deux degrés Celsius, comme l’a fait le gouvernement du Canada en approuvant les textes de la 16e Conférence des Parties et le document politique juridiquement non contraignant élaboré en dehors du système de l’ONU intitulé « Accord de Copenhague », et si on reconnaît que la prudence exige que l’on envisage des réductions plus importantes pour éviter de connaître une hausse de température moyenne de plus de 1,5 degré Celsius, alors on doit s’assurer de parvenir à un accord mondial et le mettre en œuvre à temps afin que les émissions de gaz de la planète cessent d’augmenter et commencent à diminuer au plus tard en 2015.

À ce point dans cette explication, je suis certaine que vous serez sensible à l’empressement qu’ont manifesté les nations du monde à se rassembler à Durban. Si l’on veut conclure un accord mondial qui mettra réellement fin à l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2015, les négociations de 2011 doivent avancer considérablement. Lors de la CdP de Durban, l’enjeu clé sera de s’entendre pour négocier la deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto.

Dans cette Chambre, on déforme tellement les références au Protocole de Kyoto en raison de malentendus et de rancœur partisane – et ceci vise tous les partis de la Chambre – qu’on perd les réalités les plus importantes représentées dans ce protocole.

Nous nous sommes permis, comme députés, d’établir une dichotomie entre pros et antis Kyoto et nous sommes enlisés dans un débat qui est déjà terminé. La première étape du Protocole de Kyoto se termine le 31 décembre 2012. Nous devons donc nous concentrer sur la deuxième étape du Protocole.

Le gouvernement du Canada a adopté une position figée voulant que tous les pays doivent adhérer à tout nouvel accord. Toutes les nations de la planète, soit 191 pays, ont signé le Protocole de Kyoto, à l’exception des États-Unis. Lors des débats partisans, on ne réfère à « Kyoto » qu’en termes d’objectifs acceptés par le Canada en 1997, mais le Protocole de Kyoto représente beaucoup plus que cela. Après quatorze ans de négociations approfondies, le Protocole de Kyoto constitue un cadre, une structure de gouvernance pour les prochaines étapes. Ce protocole comprend des mécanismes de reddition de comptes que le Canada respecte encore actuellement. Il comprend des règles complexes, désormais respectées par 191 pays. Donc, ce protocole représente le meilleur outil permettant de réduire les émissions dans le monde. Il n’y a pas de temps pour élaborer un nouvel instrument aussi détaillé et rigoureux que le cadre établi par le Protocole de Kyoto.

Lors des brefs échanges pendant la période de questions, il est impossible de discuter en détail de tous les avantages pour le Canada s’il s’engageait à prendre part aux  négociations de la deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto lors de la Conférence des Parties à Durban. L’Union européenne et d’autres pays ont mis de l’avant le concept de négociation de la deuxième période d’engagement tout en ignorant les pays qui ont choisi de ne pas participer. Dans quelques années, nous pourrions nous retrouver à devoir courir pour rattraper notre retard, pour nous joindre à un accord qui désavantage notre économie parce que nous n’étions pas là lors des négociations de cet accord.

Le danger le plus grave serait de voir les pays émergents refuser d’envisager tout accord qui ne soit pas établi en fonction du cadre de Kyoto. On a nettement constaté cette menace lors des discussions récentes qui se sont soldées par un échec et une déception. Si l’on veut que l’accord comprenne la Chine, l’Inde et le Brésil, alors, permettez-moi d’être franche, mais c’est Kyoto ou rien.

À l’heure actuelle, le Canada se trouve dans une position de pouvoir. Nous avons le choix. Nous irons à Durban en adoptant les positions annoncées, et on nous blâmera vraisemblablement pour l’échec catastrophique de négociations dont dépend l’avenir de nos enfants; ou bien, nous pouvons reconnaître que le meilleur moyen de respecter tous les aspects clés des objectifs et des intentions annoncés par le gouvernement du Canada consiste à négocier la prochaine phase d’engagement du Protocole de Kyoto. Le Canada peut négocier les mêmes objectifs établis par le gouvernement actuel. Les nations qui désirent un accord mondial responsable visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre éprouveront de la reconnaissance envers le Canada. Permettez-moi d’être franche une fois de plus, le Canada émet 2 p. 100 des émissions de gaz sur la planète, mais s’oppose à l’Accord qui gérera le 98 p. 100 restant. Si le Canada n’adopte pas une position anti-Kyoto extrémiste lors de la 17e CdP, il est possible que les autres signataires du Protocole de Kyoto qui déclarent actuellement qu’ils ne participeront pas à la prochaine période de négociations, notamment la Russie et le Japon, se joignent au processus. Le Canada pourrait quitter Durban en étant loué par les autres gouvernements du monde. L’autorité conférant le pouvoir d’instaurer un climat favorable aux négociations qui représentent peut-être notre dernière chance d’éviter le réchauffement effréné de la planète ne peut être exercée si un débat démocratique n’a pas eu lieu.

En d’autres mots, Monsieur le Président, il est urgent que les députés jouissent de la possibilité de partager leurs points de vue avant qu’ait lieu cette conférence dont dépendent tellement d’enjeux vitaux. Nous n’aurons pas d’autre chance.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, mes salutations distinguées.

 

Elizabeth E. May, O.C., députée
Députée de Saanich-Gulf Islands
Chef du Parti vert du Canada