Recours au Règlement – le projet de loi C-38

Marc Garneau : Monsieur le Président, je voudrais répondre au recours au Règlement effectué cette semaine par la députée de Saanich—Gulf Islands, concernant le projet de loi C-38.

Je tiens à répéter que le Parti libéral s’inquiète lui aussi beaucoup de ce projet de loi. Il est fourbe et trompeur à l’extrême de la part du gouvernement de justifier le projet de loi dans sa forme actuelle en invoquant la nécessité de stimuler notre économie fragile.

Par exemple, la décision du gouvernement de faire passer de 65 à 67 ans l’âge d’admissibilité à la Sécurité de la vieillesse à compter de 2023 peut difficilement être considérée comme une décision budgétaire cruciale, qui doit être prise maintenant et dans ce projet de loi. La plupart d’entre nous ne seront peut-être même plus ici dans 11 ans.

Tous les changements qui affectent les lois touchant l’environnement et les pêcheries constituent un autre exemple. Comment peut-on prétendre que ces changements doivent être adoptés immédiatement, afin de protéger notre économie fragile? Ces lois auront des répercussions profondes et doivent être débattues dans des projets de loi qui leur sont propres.

Ce qui s’est produit dans le cas du projet de loi C-38 est assez étonnant. Ce mégaprojet de loi budgétaire désormais tristement célèbre suscite l’indignation d’un bout à l’autre du pays, et les observations de la députée de Saanich—Gulf Islands reflètent certainement les craintes exprimées par les Canadiens. Aucun fil conducteur ne relie les éléments de ce projet de loi massif. Qui plus est, même en faisant preuve d’une très forte dose d’imagination, on ne peut attribuer à certains éléments aucune nature budgétaire. Donc, le projet de loi C-38 n’est pas vraiment un projet de loi omnibus.

Nous savons que les projets de loi budgétaires peuvent s’avérer volumineux, mais force est de constater que ce gouvernement a redéfini le terme « omnibus » en l’amenant à un niveau sans précédent.

Le leader du gouvernement à la Chambre a beau affirmer que ce projet de loi comporte un fil conducteur, celui du budget, mais qu’on me permette d’être en désaccord. On ne peut se servir du budget comme bouclier permettant de tout introduire, incluant l’évier de la cuisine.

Prenons, par exemple, le cas de l’article 52 du projet de loi. Il édicte à lui seul une loi totalement nouvelle, la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012). Or, l’article 52 n’est que l’un des 753 articles du projet de loi, et il a été étudié pendant seulement 15 minutes par le comité.

Les règles et les pratiques concernant les projets de loi omnibus ont une raison d’être. Comment les députés peuvent-ils étudier adéquatement un tel projet de loi lorsque son contenu est si vaste et si disparate? Si j’ose dire, c’est peut-être exactement ce que souhaitent les députés d’en face.

Je dois souligner à grands traits que ce projet de loi est conçu pour être pratiquement impossible à étudier adéquatement. Un projet de loi budgétaire contenant des mesures sur les finances et la fiscalité est une chose. Mais le salmigondis d’articles ayant une incidence sur plus de 60 lois fédérales qui nous est soumis constitue une proposition complètement différente. 

En conclusion, je souhaite ardemment que ce gouvernement scinde ce projet de loi en plusieurs parties car, en fin de compte, les Canadiens et Canadiennes veulent que plusieurs éléments du projet de loi C-38 soient traitées séparément. J’ai confiance que vous saurez vous prononcer en conséquence, monsieur le Président, et je vous en remercie.

Le Président : D’autres députés souhaitent-ils intervenir sur ce point?