Elizabeth May : Monsieur le Président, je prends la parole aujourd’hui pour revenir sur une question que j’ai posée au secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans le 1er juin.
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Je suis très contente que le débat d’ajournement existe parce que, comme nous le savons tous, nous disposons de très peu de temps à la période des questions pour bien expliquer le contexte des questions que nous posons. Je vais donc revenir sur ma question, l’expliquer davantage et la poser de nouveau au secrétaire parlementaire.
J’avais commencé ma question en citant une lettre assez extraordinaire, qui a été écrite par quatre anciens ministres fédéraux des Pêches, à savoir les honorables Tom Siddon, John Fraser, Herb Dhaliwal et David Anderson. Ils viennent tous de la Colombie-Britannique, mais pas du même parti. En effet, deux d’entre eux viennent du Parti libéral; et les deux autres, du Parti progressiste-conservateur.
Ces quatre hommes demandent au gouvernement d’enlever du projet de loi omnibus d’exécution du budget les articles qui n’y sont pas à leur place, c’est-à-dire les articles qui détruisent la Loi sur les pêches.
Permettez-moi de citer un extrait de la lettre.
Pour ce qui est du processus, nous jugeons troublant que le gouvernement propose, au moyen d’un projet de loi omnibus d’exécution du budget, des modifications à la Loi sur les pêches qui, à notre avis, réduiront et affaibliront inévitablement les dispositions qui visent à protéger l’habitat. Malheureusement, malgré l’importance de cette mesure législative, les ministres responsables n’ont fourni jusqu’à présent aucune justification plausible ou convaincante pour expliquer pourquoi ce processus inhabituel a été adopté.
Voici l’extrait que j’ai cité lorsque j’ai posé ma question au député:
Franchement, les Canadiens ont le droit de savoir si ces changements ont véritablement été apportés à la demande du ministre des Pêches ou s’ils ne sont pas plutôt attribuables à des groupes de pression qui n’ont rien à voir avec le gouvernement. Et si tel devait être le cas, qui sont ces groupes?
En posant cette question le 1er juin, j’ai également demandé: « D’où viennent ces groupes, du Canada ou de Pékin? »
Je sais que mon collègue a trouvé la question étrange. Je vais donc expliquer pourquoi je pense qu’elle est pertinente.
Nous sommes en train d’étudier une multitude de modifications qui pourraient être apportées à la législation canadienne sur les évaluations environnementales, des modifications qui feraient passer les décisions du Cabinet avant celles de l’Office national de l’énergie. Il est question de modifier la Loi sur la protection des eaux navigables, la Loi sur les pêches et la Loi sur les espèces en péril, et tout cela, nous dit-on, en raison de la nécessité d’approuver rapidement des projets.
J’ai une certaine expérience des projets du gouvernement du Canada. Le cas que je vais raconter s’est passé sous le gouvernement du très honorable Jean Chrétien. Dans une tentative effrénée de vendre des réacteurs nucléaires à la Chine, le gouvernement est allé jusqu’à prêter à la Chine la somme requise pour acheter les réacteurs et voulait passer outre à l’étude environnementale. À l’époque, je travaillais pour le Sierra Club du Canada et j’ai traîné le gouvernement devant les tribunaux. Malheureusement, en raison de retards de procédure qui nous ont été imposés par Énergie atomique du Canada limitée, cette affaire n’a jamais été instruite. Toutefois, le point crucial de cette histoire est que, lorsque le Canada traite avec la Chine, selon mon expérience, il abaisse ses exigences en matière d’évaluations environnementales.
En l’occurrence, il y a un grand nombre de modifications que les Canadiens considèrent insensées, et d’anciens fonctionnaires de Pêches et Océans sont du même avis. Même quatre anciens ministres des Pêches estiment que ces modifications n’ont aucun sens, et la Fédération canadienne des municipalités a adopté cette semaine une résolution d’urgence exhortant le gouvernement à retirer ces modifications.
Qui souhaite que le Canada adopte ces modifications? Je pense que deux déclarations du premier ministre pourraient nous éclairer à ce sujet. Il a prononcé une de ces déclarations à la Chambre le 10 mai en réponse à une question du chef du Parti libéral au sujet de la réduction des évaluations environnementales. Le premier ministre a dit: « C’est essentiel pour la certitude de nos investisseurs. » Nous savons aussi que le premier ministre, lorsqu’il était en visite en Chine, a promis aux dirigeants de Pékin que le projet de superpétroliers d’Enbridge irait de l’avant.
J’estime donc qu’il s’agit d’une question très pertinente. Qui souhaite que le Canada adopte ces modifications? Les Canadiens ou les investisseurs du Parti communiste de Chine?
Randy Kamp : Monsieur le Président, dans la question que la députée de Saanich—Gulf Islands nous posait à l’origine, elle nous proposait deux réponses brèves, et je peux lui dire que la seconde n’est pas la bonne.
Permettez-moi de fournir un peu plus d’information. La Loi sur les pêches a été adoptée à l’origine pour protéger les ressources halieutiques du Canada et définir les responsabilités fédérales en matière de gestion des pêches et de protection des poissons et de leurs habitats.
Les dispositions actuelles de protection des habitats contenues dans la Loi sur les pêches ont une vaste portée. Elles exigent la protection de tous les habitats des poissons, peu importe leur valeur pour les Canadiens. Ce sont des personnes concernées au Canada, et non la Chine, qui ont soulevé des objections concernant la vaste portée des règles existantes et les conséquences souvent non souhaitées de leur application.
Les agriculteurs et les propriétaires terriens ont critiqué le ministère pour avoir appliqué ses ressources conformément à son mandat dans des endroits n’ayant que peu d’intérêt pour la pêche. De plus, de nouveaux risques importants pour les pêches sont apparus et ne sont pas adéquatement pris en compte dans la Loi sur les pêches, notamment les risques que représentent les espèces aquatiques envahissantes.
Au fil des ans, de nombreuses personnes concernées nous ont demandé de nous concentrer sur les conséquences importantes et sur les pêches importantes. De plus, beaucoup de personnes concernées nous ont demandé de trouver des façons de collaborer plus efficacement avec les provinces et les groupes voués à la conservation. Elles nous ont demandé d’employer stratégiquement nos ressources pour que les Canadiens des générations actuelles et futures puissent profiter des pêches du Canada.
Pour relever ces défis, le gouvernement du Canada propose de renouveler et de renforcer sa méthode de gestion et de protection des pêches en modifiant la Loi sur les pêches. Ces modifications concentreraient les efforts du gouvernement en matière de protection sur les pêches récréatives, commerciales et autochtones.
Elles feraient également une distinction entre les cours d’eau essentiels qui font vivre les pêcheurs du Canada et ceux qui ne contribuent pas à bâtir un secteur des pêches productif, tels que les fossés de drainage, dans certains cas, et les bassins de gestion des eaux pluviales.
Ces modifications permettraient de déterminer et de gérer les grandes menaces pour les pêches, ce qui comprend les répercussions directes sur les poissons, la destruction des habitats et les espèces aquatiques envahissantes.
Je tiens à préciser que la réglementation continuera de protéger les eaux de pêche canadiennes contre la pollution, comme par le passé. Les modifications législatives proposées clarifieraient l’application de la loi.
Le projet de loi C-38 comporte un nouvel ensemble d’outils qui contribueront à renforcer nos mesures de protection des pêches commerciales, récréatives et autochtones. Nous serons désormais en mesure de repérer et de mieux protéger les lieux ayant une importance écologique, telles que les habitats de frai essentiels pour le saumon rouge.
En outre, les infractions prévues dans la Loi sur les pêches seront désormais harmonisées avec celles énoncées dans la Loi sur le contrôle d’application de lois environnementales, qui prévoit des peines maximales plus sévères. Ceux qui violeront les règles seront passibles de peines plus lourdes.
Grâce à ces modifications, nous pourrons aussi fixer de nouvelles normes précises et réalistes pour les projets effectués dans l’eau ou en bordure de l’eau. Il est tout à fait logique que le gouvernement puisse réduire ou éliminer les restrictions touchant les activités courantes qui présentent très peu de risques, sinon aucun, pour les pêches et continuer en même temps à protéger de façon adéquate, raisonnable et responsable les pêches commerciale, récréative et autochtone du Canada.
La nouvelle Loi sur les pêches nous donnerait les moyens d’élaborer des règlements efficaces interdisant l’importation, le transport et la possession de poissons vivants des espèces envahissantes qui menacent les Grands Lacs, notamment la carpe asiatique.
Le gouvernement du Canada prend très au sérieux la protection des pêches commerciale, récréative et autochtone de notre pays. Étant donné l’importance que revêtent les pêches un peu partout au Canada, nous devons concentrer nos efforts sur les mesures de protection efficaces de ces pêches. La durabilité des pêches et la productivité des stocks de poisson sont nos priorités.