Elizabeth May : Monsieur le Président, je prends la parole ce soir dans le cadre du débat d’ajournement pour revenir sur une question que j’ai posée à la Chambre le 27 novembre. La question portait sur la crise climatique.
Le Président et d’autres députés sont peut-être au courant de mes activités. J’ai participé à la 19e session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Comme leur nom l’indique, ces réunions annuelles ont lieu depuis 19 ans afin de mettre au point des mécanismes assurant le respect des engagements pris par les gouvernements du monde. Littéralement plus de 190 pays se sont engagés à éviter l’accumulation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, conformément à la Convention-cadre de l’ONU sur les changements climatiques. Dans la convention, il est question d’éviter que le niveau de gaz à effet de serre ne devienne dangereux et d’éviter les causes humaines. On parle plus précisément de changements climatiques anthropiques à un niveau qui devient dangereux.
La communauté scientifique a été recrutée par des organismes des Nations Unies — comme l’Organisation météorologique mondiale, et le PNUE pour former le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, afin de conseiller les décideurs, parce que la définition du terme « dangereux » n’est pas absolue. On pourrait dire que la situation est dangereuse à l’heure actuelle. C’était assurément le cas pour les habitants des bidonvilles lorsque le typhon Haiyan a frappé les Philippines. C’était aussi le cas pour les habitants de la côte Est des États-Unis quand l’ouragan Sandy a frappé cette région.
De dangereux événements se sont produits plus rapidement que prévu et ont frappé beaucoup plus violemment en raison du réchauffement des océans, des étranges tendances des conditions météorologiques, dont l’important ralentissement des courants jets, qui auparavant se déplaçaient plus rapidement à des latitudes moyennes de façon horizontale. Ce phénomène crée des zones de très haute et de très basse pression dans certaines régions du monde.
Les conséquences sont importantes, voire dangereuses. Pour les habitants des terres basses insulaires, on pourrait dire qu’elles sont devenues dangereuses. Le milieu scientifique a mis en garde la communauté internationale, qui a pris acte de la situation, y compris le premier ministre. La communauté internationale s’est engagée à limiter à 2 °C le réchauffement planétaire par rapport à la période précédant la révolution industrielle, autrement dit avant que les émissions d’origine anthropique ne commencent à s’accumuler.
Deux degrés, ce ne semble pas beaucoup, mais c’est dangereux. Si nous ne parvenons pas à éviter cette hausse de 2 °C, ce n’est pas un autre objectif politique que nous n’atteindrons pas, ce sont des changements irréversibles que nous provoquerons. Il sera trop tard. Il est donc impératif que nous nous attaquions aux changements climatiques et que notre pays s’y engage concrètement, ce qu’il ne fait pas pour le moment.
La question que j’ai posée au premier ministre et à laquelle il n’a pas répondu du tout, c’est s’il a l’intention d’accepter l’invitation du secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, qui, dans la foulée du typhon Haiyan, a annoncé la tenue d’un sommet spécial des dirigeants qui aura lieu le 24 septembre 2014, quelques jours avant l’Assemblée générale des Nations Unies, alors que de nombreux chefs d’État seront déjà sur place. Ce sera un « sommet de solutions », pour reprendre l’expression du secrétaire général.
À l’occasion de ce sommet, les dirigeants mondiaux seront invités à présenter des solutions et à créer une conjoncture politique favorable, parce qu’une nouvelle date butoir approche. Après l’échec de la Conférence de Copenhague en 2009, les Nations Unies, par l’entremise de la Conférence des Parties et de tous les pays participant au processus, dont le Canada, ont convenu de conclure d’ici la 21e session de la Conférence des Parties, qui aura lieu en 2015, un traité international contraignant mettant à contribution tous les pays — développés et en développement — qui serait suffisant pour éviter une hausse de 2 °C.
Il y a un profond écart entre le rythme des négociations et celui des changements climatiques dans l’atmosphère. Les heures sont comptées. J’aurais aimé que le premier ministre réponde à ma question. Peut-être le député d’en face pourrait-il me dire si le premier ministre assistera au sommet des dirigeants sur le climat.
Scott Armstrong : Monsieur le Président, je suis heureux que le député d’en face, qui vient de la Nouvelle-Écosse comme moi, nous ait fait part de ses observations.
Le Canada est toujours résolu à atteindre les objectifs qu’il s’est fixés en matière de changements climatiques et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Notre leadership et nos actions dans ce domaine le confirment. À la lumière des mesures déjà en place et des gestes que posent les administrations canadiennes, les consommateurs et les entreprises, le dernier rapport sur les tendances en matière d’émissions prévoit que le Canada produira 734 mégatonnes d’émissions de GES en 2020.
C’est 128 mégatonnes de moins que le nombre qu’on prévoyait atteindre en 2020 si aucune mesure visant à réduire les émissions n’avait été mise en place depuis 2005.
Le Canada continue aussi de jouer un rôle de premier plan sur la scène internationale. Comme nos émissions de gaz à effet de serre représentent moins de 2 % du total mondial, nous savons que toute entente sur les changements climatiques devra nécessairement prévoir la participation active de tous les principaux pays émetteurs.
C’est pourquoi nous avons continué de militer en faveur d’une nouvelle entente pendant la 19e Conférence des Parties, qui s’est tenue à Varsovie. Les résultats de la conférence sont venus renforcer cette position.
Toujours à Varsovie, le leadership du Canada a aussi permis de faire progresser une stratégie importante qui aidera les pays en développement à limiter le déboisement et le dépérissement des forêts, un phénomène auquel sont attribuables près de 15 % des émissions de gaz à effet de serre.
Je tiens à souligner qu’en plus d’avoir participé aux négociations de la 19e Conférence des Parties, le Canada a pris part à des rencontres importantes, y compris l’assemblée de haut niveau de la Coalition pour le climat et l’air pur. Le Canada, qui est l’un des principaux donateurs de la coalition, a apporté une contribution importante, qui donne lieu à la mise en oeuvre de mesures pratiques visant à réduire les émissions à court terme.
Les Canadiens devraient également être fiers d’apprendre que notre leadership est reconnu sur la scène internationale. En fait, lorsque la ministre était à Varsovie, elle s’est entretenue avec des représentants d’autres pays, qui l’ont remerciée et ont félicité le Canada de son bilan en matière d’environnement, qui comprend un cadre réglementaire sectoriel visant à lutter contre les émissions de gaz à effet de serre.
Jusqu’ici, le gouvernement a contribué à réduire les émissions du Canada grâce à une réglementation stricte visant les secteurs du transport et de l’électricité, deux des principales sources d’émissions au Canada.
Grâce aux mesures que nous avons prises jusqu’à maintenant, le Canada a renforcé sa position de chef de file mondial en matière de production d’énergie propre en devenant le premier grand consommateur de charbon à interdire la construction de centrales thermiques traditionnelles alimentées au charbon. Les voitures de tourisme et les camions légers de 2025 émettront environ deux fois moins de gaz à effet de serre que les véhicules de 2008, les véhicules lourds de 2018 émettront moins de gaz à effet de serre que ceux de maintenant, dans une proportion de l’ordre de 23 %.
Les mesures collectives que nous avons prises portent fruit. De 2005 à 2011, les émissions de gaz à effet de serre du Canada ont diminué de 4,8 %, tandis que la croissance économique du pays a augmenté de 8,4 %. En outre, les émissions par habitant ont atteint leur plus bas niveau depuis que nous avons commencé à les mesurer en 1990. Elles équivalent à 20,4 tonnes de dioxyde de carbone par personne.
Le gouvernement continuera de faire preuve de leadership dans ce dossier.