Elizabeth May : Monsieur le Président, je suis contente de me lever, car cela fait 31 heures que je suis à la Chambre sans interruption et sans sommeil. Je ne dis pas cela pour me vanter, mais plutôt pour m’excuser à l’avance si mes propos ne sont pas tout à fait cohérents.
De plus, il vaut mieux que je ne parle pas en français, étant donné que je suis très fatiguée.
Je vais parler de la motion de différentes façons. À mon avis, faire preuve d’originalité après 31 heures de débat est mon principal défi. Nous avons entendu beaucoup de belles paroles de part et d’autre de la Chambre, mais, sans vouloir offenser personne, je pense que le débat est devenu un peu répétitif. Par conséquent, j’ai pensé prendre une approche différente.
Nous voulons nous en tenir au sujet, et le sujet de la motion est un amendement de renvoi. Il est utile de remonter dans le temps et de réfléchir au fait que les amendements de renvoi étaient utilisés par le gouvernement et non pas par l’opposition. Ils ont surtout été utilisés vers 1867. C’est pourquoi la plupart d’entre nous n’en avaient jamais entendu parler auparavant, mais nous en savons maintenant davantage sur les amendements de renvoi.
Cependant, pour résumer la situation, disons que le fait d’adopter un amendement de renvoi dans ces circonstances équivaut essentiellement à rejeter le projet de loi C-6. Pourquoi voudrions-nous rejeter le projet de loi C-6? Les raisons de le faire ont été bien débattues.
Je veux expliquer la position du Parti vert sur cette question le plus clairement possible.
Nous sympathisons avec tous ceux qui subissent les inconvénients du lock-out ou de l’arrêt de travail actuel, si vous préférez. C’est le cas de petites entreprises, dont certaines sont situées dans ma circonscription. C’est aussi le cas de petits exploitants de toutes sortes, de Canadiens qui attendent leur chèque, que ce soit des personnes âgées ou de chefs de familles monoparentales qui attendent leur chèque de pension alimentaire; c’est le cas des travailleurs, des gens qui ne peuvent aller au travail alors qu’ils le voudraient, et qui ne reçoivent pas leur chèque de paie.
J’ose croire que tous les députés préféreraient voir les membres du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes faire leur travail avec une structure de gestion de Postes Canada qui leur permet de faire ce travail de manière efficace, efficiente, avec une formation adéquate. Beaucoup de problèmes qui ont été soulevés sont liés au nouvel équipement acheté par Postes Canada. Des travailleurs de Postes Canada de ma circonscription m’ont dit que la société ne leur avait pas donné suffisamment de temps ni de formation appropriée. Il y a ici certains problèmes de structure qui sont réels.
Pour le STTP, le principal enjeu, ce n’est pas les salaires. Nous avons également entendu cela. Ce n’était pas le principal point d’achoppement dans les négociations. Qu’est-ce qui achoppait alors? Des questions d’équité, des questions de pension, des questions concernant l’équipement et la formation.
Comment devons-nous résoudre le problème? Voilà où je voudrais faire preuve d’originalité. Quel est notre devoir de députés? À qui devons-nous allégeance?
Il n’y a pas très longtemps, tous les députés ont prêté le serment d’allégeance. Les députés se souviendront peut-être, à moins qu’il n’y ait dans divers partis des pratiques particulières dont je ne suis pas au courant, qu’aucun d’entre nous n’a posé la main sur la Bible pour prêter allégeance à son parti politique ou aux dirigeants de son parti politique. Bien simplement, nous avons juré allégeance à Sa Majesté la Reine Elizabeth II.
Nous avons ainsi prêté serment non parce que nous admirons une femme tout à fait admirable qui est animée d’un très grand sens de son devoir et de sa responsabilité, Elizabeth Windsor, qui vit en Angleterre et a beaucoup de petits-enfants et même des arrière-petits-enfants. Nous prêtons serment à Elizabeth II parce qu’elle représente pour nous, comme chef d’État, notre pays. Notre premier devoir à la Chambre, c’est celui que nous avons envers notre pays. Je demande donc à tous les députés de se soucier avant tout de ce qui est dans l’intérêt national, c’est-à-dire, à l’évidence, mettre un terme au lock-out, faire reprendre le travail et cesser de nous blâmer réciproquement du pétrin où nous sommes.
Il est clair que le gouvernement du Canada sympathise davantage avec Postes Canada. C’est une affaire entendue. Et je crois que tous les députés de l’opposition ont tendance à sympathiser davantage avec le STTP. Toutefois, l’opposition n’est pas le STTP, et le parti au pouvoir n’est pas Postes Canada. Nous ne pouvons pas continuer à nous substituer à des gens qui n’arrivent pas à négocier seuls. Nous devons apporter une solution pour eux, mais il ne faut pas agir brutalement ni prendre des moyens draconiens qui feront du tort à long terme à un service dont nous avons besoin pour prospérer, notre service postal public national.
J’ai entendu bien des députés, et je ne prétends en rien qu’il s’agit d’une idée originale… J’ai entendu des députés de l’opposition officielle, et même certains du parti au pouvoir, dire que nous devrions faire preuve d’un peu de souplesse. Nous devrions pouvoir régler ce problème. Il ne faudrait pas que la Chambre des communes devienne une chambre d’écho et que les Canadiens d’un bout à l’autre du pays soient stupéfaits par ce que nous faisons ici.
Étonnons les Canadiens en faisant en sorte que les députés de la 41e législature se comportent différemment. Discutons dans les couloirs, ce que certains font peut-être déjà. Retirons du projet de loi C-6 les dispositions qui sont inacceptables, en tout cas pour les députés de ce côté-ci. Trouvons un moyen d’amener les employés des postes à reprendre le travail le plus tôt possible pour répondre aux besoins des gens dont nous avons tant parlé, des gens qui ont besoin de leurs lunettes, des habitants du Nord qui attendent des produits alimentaires, des petites localités qui ont besoin de services. Tous ces besoins seront satisfaits et ces problèmes réglés dès que le lock-out sera levé et que les employés pourront reprendre le travail. Ceux qui attendent leur courrier ne se soucient pas vraiment du maintien ou de la suppression de l’article 15 du projet de loi C-6.
Je demande à tous les députés de trouver dans les quelques heures qui suivent un moyen de nous sortir des motions de renvoi. En étudiant la question, j’ai constaté avec consternation que nous pouvions proposer une autre motion de renvoi et poursuivre le débat sur le projet de loi. Nous pourrions être ici pendant des jours, ce qui n’est dans l’intérêt de personne.
Faisons l’unanimité sur les éléments qui sont sensés et réglons le problème. Ramenons les employés des postes au travail et faisons-le d’une manière qui témoigne de notre respect collectif pour eux et leur travail.